Son premier roman, Spin, lancé cette semaine au Québec sous le titre d'Ivresse, a connu un grand succès au Canada anglais. Il s'est retrouvé entre autres sur la liste des best-sellers du Globe and Mail, sera publié aux États-Unis en mars chez Harper Collins, et les deux suivants lui succéderont, en mai et en juillet. Le nom de l'auteure: Catherine McKenzie. Sa profession: avocate. Son lieu de résidence: Montréal.

Roman léger à tendance chick-lit qui parle de notre obsession pour les vedettes, Ivresse raconte l'histoire de Katie Sandford, trentenaire qui n'assume pas son âge et alcoolique en devenir, qui rêve d'être journaliste spécialisée en musique et prendra le chemin le plus long pour y arriver. Après avoir raté son entrevue d'embauche pour le job de ses rêves au magazine musical The Line - parce qu'encore saoule après une sérieuse nuit de débauche- elle se retrouve en centre de désintox dans le but d'y espionner la starlette de l'heure pour le compte d'une revue à potins.

«J'ai écrit ce roman en 2007, c'était une période où on voyait beaucoup de vedettes en désintox, avec les paparazzis qui attendaient en permanence à l'extérieur des centres, raconte Catherine McKenzie. Je me suis demandé pourquoi personne ne se faisait interner avec les vedettes. Tout de suite après, je me suis dit: «mais c'est une bonne idée de livre»!»

Catherine McKenzie aime bien prendre un sujet et le pousser à l'extrême. Son deuxième roman, Arranged, parle de mariages arrangés, en s'inspirant d'expériences comme Bachelor ou Occupation double. «Avec Ivresse, je demande pourquoi on pense qu'on a le droit de tout savoir sur les vedettes. Pour moi, c'est un phénomène troublant.»

Catherine McKenzie n'a jamais voulu choisir entre le droit et la littérature. Cette Montréalaise de 37 ans qui a étudié à McGill affirme avoir toujours écrit, mais de là à publier un, puis deux livres, et d'en avoir un troisième en marche, c'est tout un pas. «Je pense que le métier d'avocat, pourtant, prépare à la littérature, dit cette avocate spécialisée en litiges. Surtout dans mon domaine, puisqu'on écrit beaucoup. Il faut expliquer l'histoire du client pour qu'elle soit lue et comprise par le juge. On apprend tous les outils pour bien raconter.»

Entre sérieux et humour

Elle admet qu'elle évolue dans un milieu sérieux, et qu'écrire lui permet de nourrir son côté créatif et de «laisser les dossiers au bureau». L'avocate n'est cependant jamais très loin: Catherine McKenzie aime avoir une date de tombée - pour terminer avant, pas pour la dépasser! - et travaille avec tellement de rigueur qu'elle est allée jusqu'à écrire un premier roman pour vérifier si elle en était capable. Le livre, en grande partie autobiographique, dort encore dans ses tiroirs. «J'ai fait sortir mon histoire, ensuite j'ai pu faire travailler mon imagination.»

Ivresse se déroule essentiellement dans un centre de désintoxication et la question de la dépendance est au coeur du roman, puisque Katie frôle l'alcoolisme et qu'elle côtoie plusieurs dépendants, dont sa cible, Amber, une espèce de Lindsay Lohan qui n'en est pas à sa première expérience. «Katie a un problème d'alcool, mais est-elle alcoolique? Je voulais que ce soit ambigu, et c'est plus facile avec l'alcool parce que tout le monde en consomme. Avec la drogue, le problème est plus évident.»

Ivresse vogue ainsi entre les sujets plus sérieux et l'humour. L'auteure ne s'en cache pas: elle voulait faire rire. Mais même si le livre s'apparente à plusieurs niveaux à la chick-lit- l'héroïne attachante et célibataire, le groupe d'amis farfelu-, elle tique un peu lorsque le mot est prononcé. «Si les gens veulent appeler ça de la chick-lit, je comprends pourquoi. Ce n'est pas que je dénigre le genre. Mais est-ce que c'est de la chick-lit juste parce que c'est écrit par une femme, et que le personnage principal est une femme?»

Surtout que l'histoire d'amour est secondaire. L'héroïne, qui n'est pas obsédée par la quête amoureuse, pense surtout à sa carrière, ajoute l'auteure qui précise en rigolant que son personnage ne lui ressemble pas du tout, sauf pour une chose: ses goûts musicaux. Ivresse est en effet rythmé par les chansons qu'écoute cette fanatique de musique. «Je voulais que ça ressemble à un musical. La musique traverse le livre, parce que ça donne une autre dimension à l'action et aux émotions.»

Quelques mois avant la sortie du livre aux États-Unis, Catherine McKenzie regarde sa vie avec étonnement et a l'impression d'avoir doublement gagné à la loterie: d'abord être éditée, ensuite avoir du succès. Mais elle ne songe aucunement à quitter sa pratique du droit. «Si on m'avait dit il y a cinq ans que j'aurais un livre en librairie un jour, j'aurais dit «quoi»? Alors ne plus être avocate, ça ne fait pas partie de mes plans.»

Ivresse, Catherine McKenzie, Les Éditions Goélette, 467 pages