Elles sont jeunes, talentueuses et possèdent une bonne griffe: Zviane et Iris ont lancé, en début de semaine, le premier tome de L'ostie d'chat, un feuilleton amorcé il y a deux ans sur un blogue dont elles ont la garde partagée.

Zviane s'illustre dans le petit monde de la bédé québécoise depuis qu'elle a publié Le point B (2006). Son trait s'affine et elle continue de voguer habilement entre récits intimistes touchants (Apnée, par exemple) et autofiction fofolle.

Son côté givré, elle l'exploite notamment dans des mini-albums parfois délicieux qu'elle édite à compte d'auteur (Le bestiaire des fruits, notamment) et qu'on peut dénicher dans les librairies spécialisées. Zviane, c'est clair et net, aime raconter, dessiner et... publier.

Avec sa collègue Iris (Justine à La Pastèque et Pour en finir avec le sexe chez Hamac-Carnets), Zviane partage d'ailleurs la garde d'un blogue (legolaslove.canalblog.com). Les deux bédéistes y publient depuis 2009 L'ostie d'chat (rien à voir avec Garfield), un feuilleton qui s'intéresse moins au matou du titre qu'aux deux gars dans la vingtaine qui l'ont dans les jambes.

L'ostie d'chat raconte en effet les mésaventures de Jasmin et Jean-Sébastien, dont l'amitié semble avoir résisté à une foule de trahisons et d'humiliations. Avec un humour parfois féroce, les auteures explorent le passé qui lie les deux jeunes hommes et l'humeur des filles qui gravitent autour d'eux. Sans verser dans le pathos et, surtout, sans tomber dans le piège de la guerre des sexes.

Ce qui frappe dans L'ostie d'chat, c'est d'abord l'unité de ton, qui mise sur un juste dosage d'ironie, de dérision, d'hystérie et de romantisme postadolescent. Le trait net et précis de Zviane et celui, plus précipité, d'Iris, se marient par ailleurs à merveille, sans perdre leur personnalité. Il est assez aisé, d'ailleurs, d'identifier les moments où elles s'échangent le crayon. Tout est une question de découpage, de rythme et de silence.

L'articulation des épisodes va sans doute gagner en cohérence, ce qui devrait déboucher sur un récit d'une plus grande profondeur. Zviane et Iris ont tout un défi devant elles: poursuivre ce numéro d'équilibriste sans gommer son côté spontané hérité du blogue. Elles possèdent l'esprit et les moyens artistiques pour y parvenir.

L'ostie de chat - T. 1

Zviane et Iris


Coll. Shampoing /Delcourt


158 p.


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Sept personnages: superficiel

Il y a d'abord eu les sept psychopathes pressentis pour assassiner Hitler, puis des histoires axées sur des yakuzas, des missionnaires, des pirates, etc. La plus récente aventure de la série Sept mise sur des personnages momentanément extirpés de l'oeuvre de Molière. Scapin, Alceste (le «misanthrope») et Argan (le «malade imaginaire») recrutent ainsi Agnès et quelques autres pour faire la lumière sur la mort de leur créateur. Pour eux, il n'y a pas de doute: le dramaturge a été empoisonné parce qu'il allait éventer un complot... Puisque rien n'étonne dans la facture visuelle, il faut s'en remettre au scénario... qui s'avère lui aussi peu concluant. Intrigue, clin d'oeil à la peinture (Bosch), références à l'oeuvre de Molière, tout ici semble plaqué.

Sept personnages

7 figures emblématiques de Molière enquêtent sur sa mort

Fred Duval / Florent Calvez

Delcourt


56 p.


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Rewind: exercice de style

Pourchassé par deux hommes en noir armés de flingues gros comme ça, un homme cherche à sauver sa peau. Un coup de feu l'atteint, il s'effondre dans la foule et, en regardant les visages de femmes penchés sur lui, se demande laquelle pourrait le sortir de là. Son choix sera-t-il le bon? Rewind relève à la fois du questionnement existentiel et du récit narratif conceptuel. Philippe Girard (Jim le Malingre, Tuer Vélasquez) s'amuse en effet à ramener son personnage à la case départ et à lui faire explorer de nouvelles voies. Chaque «résurrection» lui permet aussi d'ajouter des pièces au puzzle et d'expliquer un peu ce qui pousse cet homme à fuir. L'effet de suspense est réussi, mais le jeu formel s'avérerait plus intéressant si le scénario possédait une plus grande profondeur. Rewind ne dépasse malheureusement pas l'exercice de style.

Rewind

Philippe Girard


Glénat Québec


135 p.


**1/2