«Toute la question est de savoir si une entreprise commerciale peut vivre en n'éditant que des ouvrages excellents de fond et de forme», écrivait Paul Claudel à André Gide, en juin 1910. Les deux fondateurs de la Nouvelle revue française publieront l'année suivante les premiers titres des Éditions de la NRF - L'otage et Isabelle respectivement -, dont la direction a été confiée à Gaston Gallimard qui donnera plus tard son nom à la plus célèbre librairie de Paris.

Pour son 100e anniversaire, Gallimard présente dans le hall de la Grande Bibliothèque, jusqu'au 19 février, l'exposition Gallimard - Un siècle d'édition 1911-2011. Pour des raisons de logistique et/ou de sécurité, on a décidé de voyager léger - l'expo arrive de Québec -, l'espace occupé étant inversement proportionnel au prestige de la maison. Des panneaux verticaux présentent les grandes étapes de l'histoire de Gallimard où l'on retrouve en grande partie celle de la littérature française avec des noms comme Larbaud et Romains, Valéry et Proust - la NRF naissante avait refusé À la recherche du temps perdu... - Malraux, Saint-Exupéry et Sartre, Yourcenar, Roth, Vargas Llosa et Kundera.

Les documents, une centaine, sont exposés dans des vitrines horizontales sous lesquelles le visiteur peut ouvrir des tiroirs-vitrines où l'on voit ici l'édition originale de Belle de jour de Joseph Kessel (1929), là une lettre de l'écrivain collaborationniste Pierre Drieu La Rochelle qui dirigeait Gallimard sous l'Occupation.

La composante québécoise de l'exposition est centrée sur Réjean Ducharme de qui Gallimard publia coup sur coup, en 1966, Le nez qui voque et L'avalée des avalés. Dans les tiroirs Ducharme: un dessin assez psychédélique qui accompagnait le manuscrit de L'océantume, envoyé à Gallimard en 1965 de «St-Ignace de Loyola, comté de Berthier, province de Québec, Canada» et un cahier manuscrit où apparaît toute la densité de l'écriture du plus secret des écrivains québécois.