L'intolérance religieuse en ce qu'elle a de plus abjecte est le thème du sixième roman de Metin Arditi, Le Turquetto, un ouvrage fascinant et superbement écrit qui nous entraîne dans le monde de la peinture vénitienne du XVIe siècle.

Turc d'origine vivant en Suisse, Metin Arditi s'est intéressé au tableau L'homme au gant attribué au peintre Titien et exposé au Louvre. Prêtée au Musée d'art et d'histoire de Genève en 2001, la toile a fait l'objet d'une expertise sur sa signature. Le T de Titien étant d'une couleur et d'une composition chimique différentes des autres lettres, l'hypothèse que la toile ne soit pas de Titien a jailli et sert de base au roman.

Fils d'un marchand d'esclaves juif de Constantinople, Elie Soriano, doué pour le dessin, émigre à Venise où il atteint la notoriété, exécutant sous le nom du Turquetto des toiles pour les notables de l'île. Mais ses origines juives cachées lui vaudront les foudres de l'Inquisition et une condamnation à mort. Les descriptions de Constantinople, où juifs, musulmans et chrétiens vivent en paix, rappellent l'humanité des ouvrages d'Amin Maalouf. La haine des catholiques vénitiens pour les juifs, qui vivent dans un ghetto, évoque des horreurs plus récentes. Voici un grand livre sur la paix, la tolérance et l'amour de l'art.

Actes Sud/Leméac, 290 pages

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