Champion des comédies douces-amères, David Foenkinos (La délicatesse, Les souvenirs) a diversifié ses intérêts avec succès au cours des dernières années. Après avoir fait dans le drame biographique (Charlotte) et l'enquête littéraire (Le mystère Henri Pick), le populaire auteur français continue d'explorer de nouvelles zones dans Vers la beauté, roman tragique qui se cache sous des allures plus légères.

Il est difficile de parler de ce nouveau roman de David Foenkinos sans éventer les surprises, bonnes et mauvaises, qui le ponctuent. La prémisse: un homme, Antoine Duris, prof aux Beaux-Arts de Lyon, quitte tout pour devenir gardien de salle au musée d'Orsay à Paris.

Vers la beauté est construit de manière à ce qu'on comprenne les choses à rebours. Il commence de manière légère, car l'arrivée d'Antoine Duris au musée ne passe pas inaperçue, et son humeur dépressive est une source de mésententes parfois amusante. Séparé en quatre parties, le livre multiplie ensuite les ruptures de ton, passant d'une certaine légèreté à la mélancolie des souvenirs, puis au drame pur.

C'est que le roman présente des destins croisés, et celui de la jeune Camille, qu'on commence à suivre à la moitié du livre, hante celui d'Antoine Duris. 

Si ce changement d'orientation abrupt permet de comprendre enfin où s'en va l'auteur, cela rend l'ensemble très inégal.

Foenkinos passe en fait d'un point de vue à l'autre de manière un peu maladroite, et le tout est émaillé de phrases légèrement pontifiantes sur la vie, l'amour et l'art - car l'art, on le sait, sauve tout. Ce qui fonctionnait parfaitement dans Charlotte, son livre sur l'histoire de la vraie Charlotte Salomon, jeune peintre juive allemande victime de l'Holocauste, semble en fait complètement artificiel ici.

Mi-figue, mi-raisin

C'est dommage, car il y a dans Vers la beauté des scènes fulgurantes et dures, une brillante intuition d'auteur qui annonce la vague du #moiaussi - le livre a été écrit avant que n'éclate l'affaire Weinstein - et une sensibilité sincère. Peut-être que David Foenkinos aurait dû assumer davantage la brutalité de son sujet, même si on le comprend d'avoir évité d'y plonger complètement.

Vers la beauté est donc un roman mi-figue, mi-raisin, qui a un goût d'inachevé, comme si l'auteur n'avait pas eu la profondeur de ses ambitions. On applaudit malgré tout son désir de prendre de nouveaux chemins, et sa volonté de se pencher sur des sujets plus graves.

C'est surtout l'absence d'un point de vue fort et unique qui plombe l'effet général du roman, mais cela n'enlève rien au courage qu'a eu Foenkinos. Voilà un auteur qui pourrait s'asseoir sur ses lauriers, mais qui préfère se mettre en danger. Le résultat, pas complètement raté, n'est tout simplement pas à la hauteur, inconsistant surtout dans les deux premières parties. Cela donne donc un Foenkinos moyen, pas nécessairement à éviter, mais pas son meilleur cru non plus.

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Vers la  beauté. David Foenkinos. Gallimard. 222 pages.