Un nouveau prix a vu le jour lors du dernier Salon du livre de Montréal. Il s'agit du bien nommé Chasse-Spleen remis avec beaucoup d'enthousiasme par plus de 75 personnes au poète Roger Des Roches.

Ce sont les poètes Kim Doré, Jean-François Poupart et Catherine Lalonde qui ont concocté ce réjouissant prix Chasse-Spleen dédié à Roger Des Roches pour son recueil Douzejuilletdeuxmillequatre. «Jean-François, Catherine et moi-même étions à Lyon pour le Festival Parole Ambulante, qui offrait une vitrine pour les poètes québécois, lorsque nous avons abordé l'idée, explique Kim Doré. Nous nous retrouvions régulièrement autour d'un pot à discuter avec nos compatriotes. Tout en parlant, nous nous sommes rendu compte que l'engouement pour le livre de Roger Des Roches était généralisé. Tout le monde connaissait une voisine, un libraire, une bibliothécaire qui partageait notre enthousiasme. C'est rare qu'il y ait autant d'unanimité, c'était frappant.»

 

Les poètes remarquent rapidement que cet engouement n'est pourtant pas représenté dans les institutions officielles qui priment les oeuvres. «Nous avons donc peaufiné l'idée dans l'avion du retour, relate-t-elle avec amusement. Il ne s'agissait pas d'utiliser Roger Des Roches pour faire un plaidoyer, mais bien de faire quelque chose pour un livre qui avait eu une résonance extraordinaire. Nous avons eu l'idée de créer un prix d'acclamation populaire par ceux qui font la poésie, la lisent et, ou, la fabriquent.»

La reconnaissance des pairs

Le prix Chasse-Spleen tient en fait son nom d'un vin du même nom de la région de Bordeaux. «Puisque nous avions décidé de chasser le spleen du poète oublié des circuits, nous trouvions bien entendu le nom de ce vin fabuleux, précise Kim Doré. Nous avons donc convenu que le prix s'assortirait d'une ou deux bouteilles grâce à une contribution volontaire d'un jury autoproclamé.»

Or, l'idée a tellement galvanisé le petit milieu de la poésie que les bouteilles se sont multipliées. L'ampleur des réactions à la suite des envois de courriels étonna d'ailleurs les trois instigateurs, qui se retrouvèrent avec un jury de 75 personnes. «Nous savions que c'était pertinent parce que nous avions observé l'engouement, mais nous avons quand même été surpris, relate Kim Doré. Nous croyions que ce serait un petit geste marginal, mais finalement ça a pris toute une puissance symbolique.»

Même si le principal intéressé avait été accidentellement mis au parfum, le poète Roger Des Roches a reçu en plein coeur la charge d'une telle manifestation spontanée de la communauté le soir de la remise. «Il y a une telle solitude dans l'acte d'écrire qu'elle doit parfois recevoir une réponse», admet le poète qui fête cette année ses 40 ans de publication en même temps que la maison d'édition Les Herbes rouges.

«Quand on m'a lu la longue liste du jury, j'ai vraiment été ému parce que ce sont mes pairs qui me parlent à travers ce prix, renchérit-il. Mon livre a été l'amorce de tout ça et ça m'a bouleversé. Ça m'a aussi bouleversé de voir tous les sourires des gens présents, des jeunes, des moins jeunes... Il y avait aussi des gens que je ne connaissais presque pas!»

Doit-on souhaiter une longue vie au prix Chasse-Spleen? «C'est une idée qui est lancée et qui est à la portée de tous, répond Kim Doré. Il faut toutefois que le phénomène soit palpable pour qu'il soit reconduit, on ne peut pas déclarer n'importe quoi... surtout après l'ampleur de cette première édition!»

Dixhuitjuilletdeuxmillequatre

Roger Des Roches

Les Herbes rouges, 55 pages, 12,95$

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