Le président français Nicolas Sarkozy a personnellement choisi lundi le nouveau patron de France Télévisions (audiovisuel public), en la personne de Rémy Pflimlin, exerçant ainsi un droit controversé qu'il s'est octroyé par une loi de février 2009.

Rémy Pflimlin, 56 ans, actuellement président de l'organisme de distribution de la presse Presstalis, va succéder à Patrick de Carolis qui présidait depuis 2005 la holding regroupant notamment les chaînes de télévision France 2 et France 3, a annoncé l'Elysée.

Auparavant, les patrons de l'audiovisuel public en France étaient nommés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), autorité de régulation du secteur, dont les décisions doivent être indépendantes du pouvoir politique.

Depuis la loi de 2009 réformant l'audiovisuel public, c'est le chef de l'État qui désigne les patrons des groupes publics de radio et télévision.

En dépit des critiques sur les risques d'ingérences politiques dans les médias, Nicolas Sarkozy a toujours affirmé que l'État devait exercer ses responsabilités d'actionnaire des chaînes publiques et que les nominations devaient donc lui revenir.

Cette nomination des patrons de médias publics par l'exécutif est une exception française à l'échelle de l'Europe qui suscite les critiques de l'opposition.

Le secrétaire national du Parti socialiste chargé des médias, Patrick Bloche, a reconnu en M. Pfimlin un «professionnel des médias». Mais «il pèsera sur toutes les orientations et tous les choix à venir du nouveau président de France Télévisions le doute lié à sa nomination directe par le président de la République», a-t-il dit.

«La nomination du président de France Télévisions directement et personnellement par le président de la République est un processus profondément malsain», a estimé le leader centriste François Bayrou.

Nicolas Sarkozy a usé de ce droit de nomination des patrons de médias public la première fois en mai 2009, pour désigner le journaliste Jean-Luc Hees à la tête de Radio France.

Le groupe de radio public vient se trouver sous le feu des critiques, après le limogeage fin juin de deux humoristes connus pour leurs pamphlets au vitriol du monde politique. La suppression de leur chronique a été perçue par certains comme téléguidée par l'Elysée.

«La crise qui secoue France Inter depuis l'éviction brutale de deux chroniqueurs impertinents a montré très vite les limites de l'indépendance des dirigeants nommés par le président de la République», a déclaré lundi le Syndicat national des journalistes (SNJ) de France Télévisions.

Rémy Pflimlin a mené toute sa carrière dans les métiers de la presse, écrite et audiovisuelle, dans des journaux de l'est de la France, puis à France 3, dont il fut le directeur général de 1999 à 2005.

Le nom d'Alexandre Bompard, jeune patron de la radio Europe 1 (groupe d'Arnaud Lagardère, proche de Nicolas Sarkozy) avait un temps circulé. Il avait été retiré à la suite de critiques sur sa proximité avec le président.

Nicolas Sarkozy est régulièrement accusé de se mêler de la vie des médias. Il avait récemment fait connaître sa préférence concernant le repreneur du quotidien Le Monde, le plus prestigieux du pays, entraînant une autre levée de boucliers.

D'une façon générale, le Syndicat national des journalistes SNJ-CGT a récemment accusé le président de vouloir placer «des médias sous influence en vue des élections de 2012».