Les jeunes qui passent des heures devant les écrans, de télévision ou d'ordinateur, deviendront-ils des citoyens désengagés? C'est ce que craint parfois la génération de leurs parents.

Pour l'instant, il semble que ce ne soit pas le cas. Une récente étude du Pew Research Center's Internet and American Life Project montre en effet que les internautes sont très engagés dans leur communauté. Le sondage révèle que les trois quarts des Américains pratiquent une forme ou une autre de bénévolat ou d'engagement. Cette proportion grimpe à 80 % chez les utilisateurs de l'internet alors qu'elle n'est que de 56 % chez les gens qui se tiennent loin du cyberespace. Les adeptes des médias sociaux seraient les plus engagés de tous (82 %), juste après les abonnés de Twitter (85 %).

Un doute demeure toutefois: ce sondage a été réalisé auprès d'individus de 18 ans et plus. Les plus jeunes montreront-ils le même intérêt à s'engager pour des causes comme l'environnement ou les droits de la personne, ou encore pour faire du bénévolat dans leur communauté?

La génération C, dont les membres sont âgés aujourd'hui de 12 à 24 ans, a grandi avec une souris greffée dans la main et un ordinateur intégré au cerveau. Ces jeunes qu'on dit individualistes et qui communiquent entre eux par écran interposé seront-ils aussi nombreux que leurs parents à s'engager en politique, à militer pour des causes et à jouer leur rôle de citoyen?

Oui, affirme un récent document publié par le Centre francophone d'informatisation des organisations (CEFRIO). À la condition, toutefois, que les différentes institutions et organisations politiques et civiques sachent les rejoindre.

Conseils

Dans le document intitulé Dix conseils pour mobiliser les jeunes citoyens et mieux les servir, on écrit: «Nombreux sont les gens qui pensent que les C devraient s'engager ou se tenir au courant de l'actualité comme eux faisaient par le passé. (...) Les jeunes sont nombreux à avoir délaissé les quotidiens mais beaucoup utilisent maintenant les blogues citoyens, Twitter ou Facebook pour s'informer ou pour faire connaître leur opinion sur des sujets comme le gaz de schiste, le féminisme ou la position canadienne en Afghanistan.»

À la lumière de ces nouvelles façons de «consommer» l'information, on peut s'interroger sur la nature de l'engagement qui en découlera. En effet, il est facile de cliquer «J'aime» sur le site de Greenpeace ou d'Amnistie internationale ou encore d'envoyer une vidéo virale dénonçant la chasse aux phoques. Est-ce que cet engagement virtuel se traduira automatiquement par une participation aux élections ou un engagement politique sérieux? C'est moins sûr.

Parmi les recommandations énumérées dans le document du CEFRIO (et qui s'adressent principalement aux syndicats, partis politiques, organismes gouvernementaux, etc.), on suggère d'utiliser le marketing viral et l'humour sarcastique pour rejoindre et toucher les jeunes, tout en restant authentique (on cite l'exemple du faux blogue de BIXI comme LA CHOSE à ne pas faire) lorsqu'on s'adresse à eux.

Par contre, on ne semble pas du tout s'inquiéter du risque qui menace cette génération numérique, celui d'une citoyenneté en kit, morcelée, incomplète. Comment peut-il en être autrement quand on s'informe par petits bouts, à gauche et à droite, sur Twitter, Facebook et sur des blogues absolument pas objectifs?

Information et citoyenneté sont intimement liées. Ce n'est pas le temps passé devant un ordinateur qui menace l'engagement citoyen, c'est le désintérêt des jeunes à l'égard de l'information.

L'information comme un jeu vidéo

Les bulletins d'information devraient-ils appliquer les principes du jeu vidéo pour attirer les auditeurs? C'est la réflexion que mène Chris O'Brien, journaliste spécialisé dans les questions qui touchent l'avenir du journalisme, observateur expérimenté des innovations qui nous viennent de Silicon Valley et d'ailleurs. Depuis la semaine dernière, M. O'Brien tient un blogue dans lequel il compte explorer les nouvelles façons avec lesquelles on pourra produire, consommer et interagir dans le monde de l'information. M. O'Brien raconte que les développeurs de jeu comme Farmville, par exemple, ont connu un succès immense et se posent aujourd'hui la question: si on réussit à convaincre un individu de consacrer des heures à labourer des champs virtuels et à nourrir des chèvres numériques, est-ce qu'on pourrait utiliser les mêmes méthodes afin d'emmener les gens à faire quelque chose qui a un sens? Pour en savoir davantage sur la démarche de Chris O'Brien, allez voir sur le site de PBS (www.pbs.org\idealab). Pour lire son blogue: newstopiaville.com