N'est-ce pas un peu fou de lancer un magazine papier en 2011? C'est la question qui circulait sur Twitter, mercredi dernier, lorsque Nicolas Langelier, ancien rédacteur en chef de P45 et auteur du roman Comment réussir son hypermodernité..., a invité les gens à participer financièrement à son Nouveau Projet, un magazine qui devrait voir le jour l'automne prochain.

Nouveau Projet - un titre de travail qui risque de devenir permanent - se veut un magazine culture et société qui devrait être publié deux fois par année et qui se situe à mi-chemin entre le français XXI et les américains Harper's et The New Yorker. «On veut publier des longs textes, qui ont du style, une personnalité, quelque part entre le journalisme et la littérature. Il y aura des essais, des reportages, des critiques, mais aussi de la bande dessinée, explique Nicolas Langelier. Je sens qu'il y a un véritable besoin pour un magazine différent.»

Nicolas Langelier ne se lance pas seul dans cette aventure: Jocelyn Maclure, professeur de philosophie à l'Université Laval, sera coéditeur de la publication. «Jocelyn a lu une entrevue que j'ai accordée à La Presse lors de la sortie de mon livre et dans laquelle je parlais de mon désir de lancer un magazine. Il a pris contact avec moi et on s'est rencontrés. On se complète bien. Il apporte ses connaissances et ses contacts, qui sont très différents des miens», raconte Nicolas Langelier.

L'ancien président de l'Association des journalistes indépendants (l'AJIQ) a choisi une voie audacieuse pour sa souscription: il a soumis son projet sur kickstarter.com, un site web qui est une sorte d'incubateur pour les nouvelles entreprises à la recherche de financement. En l'espace de 24 heures, Nouveau Projet avait dépassé son objectif de 10 000$.

Cela dit, on ne lance pas un magazine avec une si petite somme, d'où la question: n'est-ce pas un peu fou de lancer un magazine, papier de surcroît, alors que les magazines se cherchent et que leurs ventes sont en baisse pour la plupart?

«Oui, c'est complètement fou, répond Nicolas Langelier qui, en plus d'être coéditeur, sera rédacteur en chef de la nouvelle publication. Ce n'est pas la voie prudente, mais je sens qu'il faut le faire. J'ai presque le sentiment de «devoir» le faire. Si ça fonctionne, tant mieux, sinon, tant pis. J'aurai essayé.»

«Pourquoi le papier? poursuit-il. Parce que ce serait encore plus suicidaire de ne lancer qu'une version électronique. L'argent est encore dans le papier, alors on fera les deux, en chevauchant la transition.» Il y aura donc un Nouveau Projet papier ainsi qu'une version numérique et un site web, «afin d'être présent entre les deux numéros. Pour une application, il faudra attendre. C'est cher et pour l'instant, le marché n'est pas énorme».

À l'heure où la presse écrite quotidienne et magazine se cherche un nouveau modèle économique, Nouveau Projet misera surtout sur les revenus d'abonnements. «Il y aura bien sûr des publicités et des ententes commerciales, mais je veux surtout faire payer un juste prix pour le magazine. Pas question de solder les abonnements au tiers du prix.» (À titre d'exemple, le magazine XXI, lancé en janvier 2008, se vend au prix de 15). Pour l'instant, Nouveau Projet est complètement indépendant et ne recevra aucune subvention. «Je n'avais pas envie de charité», souligne le coéditeur et rédacteur en chef.

Quant aux mécènes qui ont contribué à la souscription sur kickstarter, ils auront le statut de mécènes fondateurs, ce qui leur donnera droit d'avoir leur nom dans le magazine ainsi que des cadeaux, une invitation au lancement, etc. Le magazine pourra également compter sur un comité éditorial composé entre autres de l'auteure Caroline Allard, de la réalisatrice de l'émission Christiane Charette Marie-Claude Beaucage et du chroniqueur en arts visuels Nicolas Mavrikakis.

Pour en savoir plus: nouveauprojet.ca

Lire plus longtemps

Les tablettes numériques semblent avoir donné un second souffle aux longs textes et aux reportages littéraires. Plusieurs études confirment que les gens ont tendance à lire de plus longs textes sur leur tablette numérique que dans un magazine papier. Pas étonnant que plusieurs sites et applications aient vu le jour récemment: on vous avait parlé de theawl, longform et the atavist. Il y a aussi byliner qui publie ces jours-ci un très long reportage de William T. Vollmann sur le quotidien des Japonais au lendemain de l'accident nucléaire de Fukushima. On peut se le procurer sur le site byliner.com au coût de 2,99$.