Star Académie 4 démarre demain, 19h30, sur les ondes de TVA. En attendant de découvrir le visage des 14 nouveaux académiciens de 2009, voici un retour sur la carrière musicale des trois cohortes d'académiciens formés chez Julie Snyder (2003, 2004 et 2005).

Oui, je l'ai fait. Au boulot. Sur un banc de métro. Dans l'auto. Entre deux séries d'abdos. J'ai réécouté tous les disques gravés par tous les académiciens de toutes les promotions (2003, 2004 et 2005). Enfin, presque tous. Ça fait plus de 35 CD, en incluant les compilations, les trios (comment oublier Ent'chums de Frank, Dave et Stef?) et les duos des soeurs Villeneuve. Un seul mot résume ce genre de journalisme citoyen: ouf.

 

Cette opération épuisante, autant physiquement que mentalement, a pris plus de 10 jours, au rythme d'environ trois galettes aux 24 heures. Le bilan? Dans Star Académie, il y a du bon, du moyen, du mauvais et du plus pire, pour paraphraser Boom Desjardins, ce grand poète du quotidien.

Soyons honnêtes, la majorité des diplômés à l'école de showbiz de Julie Snyder ont échoué à leur examen final, inondant le marché de disques peu originaux et d'une banalité assommante. Cette catégorie regroupe notamment Corneliu Montano (éponyme), Suzie Villeneuve (éponyme), Stéphane Mercier (en solo avec Voilà), Linda Rocheleau (Je suis qui je suis) et Marc Angers (L'enfant-roi).

Il y a les étoiles qui ont brillé quelques secondes avant de s'éteindre, dont Maritza (Comment j'feel), Élyse Robineault (Sortilège et The Open Book) et Meggie Lagacé (Tête première).

Il y a ceux qui s'accrochent comme Étienne Drapeau (déjà deux CD, dont Je l'ai jamais dit à personne), Martin Giroux (Faut que j'te dise et En cavale) et Émily Bégin (Légende urbaine et Émily). Puis, il y a ceux qui durent, les Wilfred, Marie-Élaine, Marie-Mai et Annie Villeneuve. Voici un échantillon - et un bulletin bien personnel - de quelques anciens élèves qui ont appris leurs ritournelles à Sainte-Adèle depuis 2003.

La première de classe

Marie-Mai

Elle a du chien, cette Marie-Mai. Beaucoup de pep aussi. Et c'est une des rares à fabriquer de la musique pour des fans qui n'ont pas 78 ans ou un motorisé en Arizona. Plusieurs bombes sur son Inoxydable, dont Il faut que tu t'en ailles, Tu t'en fous et Rien. Plus rock, plus décapant, son deuxième effort (Dangereuse attraction) a été propulsé par Mentir, une chanson pop habilement construite. Dans une pièce qu'elle a coécrite, Marie-Mai se questionne: qui prendra ma place? Réponse: personne. Pour l'instant, du moins.

La studieuse et talentueuse

Marie-Élaine Thibert

Déjà trois disques au compteur, dont un de Noël, pour la plus belle voix de Star Académie. Son premier opus renferme de jolies choses comme Dans chacun de mes silences (tout en retenue), mais aussi des morceaux moins réussis (Fille de ville). Sur Comme ça, elle démontre plus d'assurance, plus de maturité, laissant poindre une longue et prolifique carrière. Elle monte, elle vole, le ciel est à elle.

L'élève douée un brin paresseuse

Annie Villeneuve

Difficile de trouver des défauts à l'angélique Annie Villeneuve: belle comme un coeur, voix juste et cristalline, bonne humeur contagieuse. Son CD Quand je ferme les yeux lui ressemble: rien ne dépasse, rien ne sort de la marge. Bref, un peu banal, mais pas désagréable. Sur Tomber à l'eau, du pop-folk très bien ciselé, la blonde interprète offre le meilleur d'elle-même. Le pire, c'est Juste un instant, une complainte sans âme et sans saveur. Et avec seulement 10 pièces, dont une reprise de Marjo, la diplômée de la première année de Star Académie a été chiche avec ses fans. Au travail, Annie!

L'intello branchée

Stéphanie Lapointe

Très joli disque que Sur le fil. Doux, planant et aérien (parfois trop, mais bon). Une bulle de musique parfaite pour les après-midis d'hiver, les pieds sur la bavette du poêle. Et enfin, une académicienne avec une démarche artistique cohérente du début à la fin. Imaginez un mélange de Coeur de pirate, Ariane Moffatt et Catherine Durand. Les arrangements signés Francis Collard sont magnifiques. Le livret aussi. Vraiment, la gagnante de Star Académie 2 n'a pas volé son diplôme.

Dans la moyenne

Audrey Gagnon

Le premier extrait d'Ad Vitam, Tu m'aimes, une ritournelle très accrocheuse couchée sur des guitares pop, a beaucoup tourné dans les stations adultes contemporaines. Ce type de chanson très rythmée (Taire ces larmes, Impressionne-moi) sied bien à la finaliste de Star Académie 3. Honnêtement, ça s'écoute assez bien en auto. Au rayon des ballades sirupeuses (Ma prière, Si j'attends), houla! ça se gâche dramatiquement. Elle hurle beaucoup trop, cette Audrey. Le duo (S'il ne restait) avec Jean-François Dubé, leader de Noir Silence, est si banal qu'il pourrait figurer sur le prochain disque de la Saguenéenne: Ad Vietnam. Parce que c'est douloureux et souffrant.

Sous la moyenne

Marc-André Fortin

Malheureusement, le gagnant de Star Académie 3 bousille sa voix claire et limpide sur des musiques d'ascenseur ternes et sans éclat. À l'écoute de son deuxième CD, Juste ici, on se demande si cet académicien n'a pas 57 ans tellement il chante des trucs empoussiérés du style Avec simplicité de Richard Cocciante. Sa photo rassure: il n'a pas encore 30 ans. Alors, pourquoi n'embrasse-t-il pas des rythmes plus jeunes, plus dynamiques comme Une année dans un jour, son sympathique duo avec Annie Villeneuve? S'il continue sur cette voie pépère, Marc-André Fortin redoublera et atterrira dans la classe des élèves à problèmes (bonjour Frank, Dave et Stef). En attendant, c'est la retenue.

L'élève recalé

Marc-André Niquet

OK, commençons avec la seule note positive au dossier: le finaliste de Star Académie 2 porte du beau linge. Sinon, son CD ne renferme que de la musique générique plaquée sur des paroles creuses et dégoulinantes de mièvrerie (sable mouillé, plages de janvier, etc). En ratissant très large et en tentant de rejoindre le plus vaste public possible, Marc-André Niquet fait exactement le contraire: il ne vise plus personne. Encore ici, les pièces les plus potables (Je te resterai, Sans refrain) sont les plus entraînantes, donc celles qui masquent les lacunes de sa voix. Pénible.

La recrue prometteuse

Annie Blanchard

Un peu de steel guitar, quelques accords de banjo, le premier opus d'Annie Blanchard (Sur l'autre rive) dégage une douce mélancolie qui accompagne parfaitement les jours de pluie d'été, au bord d'un lac. L'Acadienne catapultée par Évangéline trempe ses mélodies dans du country pop très agréable et les enrobe de sa voix rassurante. Chansons à écouter: Si je m'égare, La vérité et Aide-moi à passer la nuit, une adaptation de Help Me Make It Through The Night de Kris Kristofferson. C'est de bon augure pour les prochaines années.

Le timide persévérant

Wilfred Le Bouthillier

Je l'aime bien ce Wilfred, qui gratte sa guitare avec précision. Son premier CD contenait des tubes intéressants comme Je ferais tout, rempli de vitamines. Son deuxième disque (Poussières) m'a un peu moins accroché. Le hit Avec toi, solide et entraînant, a été adopté par les radios. Chapeau à Annie Horth, qui a signé la direction artistique de la pochette et du très beau livret de Poussières, en teintes de gris. Mais attention: à trop lui faire porter des vêtements dernier cri ou des coupes de cheveux dans le vent, on a l'impression que le discret Wilfred se cherche encore.

L'infatigable

Émily Bégin

Depuis sa sortie de Sainte-Adèle en 2003, l'énergique Émily tente avec plus ou moins de succès de percer un marché très difficile: celui de la musique urbaine et «dance» en français. Son premier gravé (Légende urbaine, sorti en 2004) sonne comme un mélange de Sean Paul, Mylène Farmer et les Black Eyed Peas, mais avec beaucoup moins de budget. Et ça s'entend. L'album souffre de textes et paroles plutôt faibles (Mata Hari, Havana, En flag'). Le deuxième CD explore les mêmes sonorités r'n'b avec les mêmes défauts que le précédent (la reprise de Laissez-moi danser n'est pas très réussie). Malgré tout, la personnalité pimpante d'Émily, sa détermination et son sourire lumineux nous la rendent très attachante.

CERTIFICATS DE DÉSHONNEUR

Le duo le plus pénible

Marie-Ève Côté et Corneliu Montano (Vivo per lei). La voix de Marie-Ève, éteinte et robotisée, semble provenir d'une galaxie loin, très loin de chez nous. Aïe.

Les pochettes les plus laides

Marie-Élaine Thibert (éponyme) et Martin Giroux (En cavale). Sur la première, le visage de Marie-Élaine est flou. Sur la deuxième, la face du chanteur n'est même pas éclairée. Ordinaire.

La voix la plus faible

Meggie Lagacé (Tête première), qui a tout de même parcouru beaucoup de chemin avec son minuscule organe vocal. Qui se souvient de Je brûle encore pour toi?

La pire promotion

la deuxième, celle de 2004, avec Corneliu, Marc-André Niquet et Dave Roussy. Il n'y a que Stéphanie Lapointe qui a émergé du lot (on attend d'ailleurs son prochain disque avec impatience).

Les paroles les plus douteuses

Émily Bégin sur Légende urbaine. Exemples? Faire rimer supernova avec casse-tête chinois dans la chanson Karmanova. Ou «ready, j'call un tax. Go! Vers le club le plus classe» dans DJ. Vite, un dictionnaire.

Le disque le plus échevelé

Corneliu Montano, qui passe d'Ils s'aiment de Daniel Lavoie à Nessun Dorma, pour terminer avec Minuit, Chrétiens. De l'opérette difficilement supportable.

Le CD qui n'aurait jamais dû sortir

Ent'chums, de Frank, Dave et Stef. Avec des titres comme Pinto et Grosse boule d'amour, mettons que ça n'incite pas à l'acheter. Quand on l'écoute, c'est encore pire. «On va prendre la Pinto à Dave, pis on va rouler toute la nuit.» Non, merci. Moi, je prends le bus.

La prise de son ratée

Marc Angers sur L'enfant-roi. En plus de sa sonorité très «amateur», ce disque est solidement déprimant. Où est passée la joie de vivre qui caractérisait le violoniste roux de la Star Ac?

Titre de chanson le plus étrange

Libellune de Bruno Labrie. Oui, oui, comme dans lune et libellule. Fallait y penser, non?

L'album le plus rétro

Suzie Villeneuve, qui nous rappelle qu'en 1992, la musique n'était pas si bonne que ça, finalement.