C'est en effet une Céline tout feu tout flamme qui a surgi sur la grande scène carrée, pour ce spectacle judicieusement précédé et suivi d'un congé pour la diva (elle sera de nouveau au Centre Bell samedi et dimanche). Les musiciens aussi étaient en grande forme, et si les danseurs me semblaient toujours aussi peu utiles qu'en août, ils ont su se montrer plus souriants en fin de spectacle.

À l'occasion de cette neuvième représentation de Taking Chances à Montréal, six mois après les huit premières (devant un total de plus de 167 000 spectateurs), j'ai eu l'idée peut-être saugrenue de ressortir la critique écrite il y a 15 ans quasi jour pour jour, en mars 1994, alors que Céline Dion était également venue présenter à nouveau son spectacle... au défunt Théâtre du Forum! À l'époque, j'avais intitulé la critique À la fois pareille et différente et ce titre aurait pu tout à fait convenir au spectacle d'hier, où les chansons étaient sensiblement les mêmes (retrait de Je sais pas, introduction de The Prayer en duo avec Andrea Bocelli sur écran géant, pot-pourri soul à la place des chansons de Queen...) mais enchaînées de façon plus fluide.

Si la chanteuse avait toujours la voix aussi solide qu'en août, elle semblait nettement plus détendue et rieuse, hier. Au point que la belle Céline ne pouvait s'empêcher de cabotiner et de «faire des faces» à la fin de presque toutes ses chansons - ce qui était parfois dommage, car à trop surjouer l'émotion, Céline empêche un peu le public d'éprouver, lui, l'émotion voulue. Cela n'empêchait manifestement pas les très nombreux fans de tous âges de clamer leur amour et de multiplier les ovations.

Et souvent avec raison. Toujours en mars 1994, j'avais dit de Céline Dion qu'elle était «notre Maurice Richard des années 90», ce qu'elle est toujours et plus encore : c'est désormais elle la légende, la Rocket... J'avais aussi dit d'elle qu'elle était notre Barbra Streisand, ce qu'elle est toujours et plus encore, puisqu'elle occupe désormais quasi toute la place dans le coeur de millions de fans sur la planète. Et j'avais aussi dit qu'elle était un peu notre Janet Jackson, ce qui est toujours le cas, et même plus : danseuse dans l'âme, très physique sur scène, Céline Dion l'est toujours, alors que Janet, elle, a à peu près disparu.

Ce qui n'a absolument pas changé, c'est justement l'amour du public, cet amour inconditionnel pour «notre Céline», celle qui dédie sa chanson L'amour existe encore à un certain Éric (à qui elle dit «guéris vite pour qu'on puisse la chanter encore ensemble»), qui invite tout le monde à taper des mains ou se faire aller les bras, qui sourit à pleines dents, qui fait le clown sur scène, pas toujours au moment opportun, mais c'est ça aussi, Céline... Et tous ceux présents au Centre Bell, la petite fille qui dansait dans les gradins, tout un groupe de fans habillés de t-shirts et de casquettes rouge vif, du monde venu de Toronto pour l'occasion, des tas de jeunes femmes qui connaissaient toutes les paroles, une maman berçant son enfant en fredonnant S'il suffisait qu'on s'aime, les chanceux assis tout près des scènes secondaires qui lui ont donné la main à qui mieux mieux, oui, tous ceux-là et tous les autres étaient heureux du Power of Love (très bien interprété) qui les unit à jamais, semble-t-il à «leur» Céline.

Fantastique Véronic

Un mot encore pour souligner la performance de Véronic DiCaire en première partie en imitatrice exceptionnelle - et parfois mordante - de Diane Dufresne, Marie-Élaine Thibert, Marie-Chantal Toupin, Marie Carmen, Lynda Lemay («elle a écrit plus de 4000 chansons et ça, sur une seule mélodie»), Édith Piaf... Elle a également imité René Angélil, Julie Snyder et Claire Lamarche de façon hilarante, de même que Céline Dion chantant un Joyeux anniversaire pas piqué des vers. Mais c'est son duo Ginette Reno - Céline Dion chantant Un peu plus haut, un peu plus loin qui lui a valu l'ovation la plus nourrie. Bref, une première partie encore plus solide qu'en août, qui augure bien pour le spectacle que Véronic DiCaire donnera sous peu au Théâtre Saint-Denis et qui démontrait hors de tout doute qu'elle a non seulement des dons d'imitatrice hors pair, mais également et surtout une très belle voix.