Stevie Wonder ne fait jamais les choses comme tout le monde. En pleine conférence de presse, quelques heures avant son spectacle qui devait lancer les festivités du 30e anniversaire Festival de jazz de Montréal et inaugurer la Place des festivals, l'artiste américain de 59 ans s'est installé au piano noir, construisant progressivement une musique proche du jazz. Puis il s'est mis à chanter, tout doucement, son grand succès I Just Called To Say I Love You dont le refrain s'est transformé en un témoignage d'amour et de respect envers son ami disparu, Michael Jackson.

Jusque-là, Stevie Wonder avait répondu prudemment, et avec une pudeur qui l'honore, aux questions des journalistes au sujet du chanteur disparu, soulignant d'entrée qu'il s'était fait plutôt discret depuis la mort de la Jackson. Quand on lui a demandé pourquoi il n'avait pas connu le même destin, lui qui a lancé son premier album à 11 ans et a aussi grandi sous les projecteurs, Wonder a dit en substance que s'il n'avait pas croulé sous la pression, c'est qu'il n'avait de comptes à rendre qu'à Dieu et que tout le reste était secondaire. Les journalistes sont revenus à la charge et Wonder a répondu qu'il ne connaissait pas tout de Michael Jackson et qu'il n'accordait pas d'importance au ouï-dire.

Faisant référence à d'autres grands disparus comme John Lennon, Marvin Gaye et Bob Marley, il a rappelé que même si on aime profondément la vie, personne ne vit éternellement. «On peut juste faire son possible pour soi-même et pour ceux qu'on aime et, à ce chapitre, je pense que Michael a fait du bon travail.»

Lors de ses deux dernier concerts, Stevie Wonder a rendu hommage à sa façon à Michael Jackson, mais il n'a pas voulu en dire davantage sur le spectacle qu'il allait donner dans la soirée, sinon qu'on y célébrerait Michael Jackson, artistes et public réunis.

Trois projets



Avant de faire un album de jazz avec Tony Bennett et Quincy Jones, Stevie Wonder terminera d'abord l'album de gospel qu'il a promis à sa mère Lula et avec qui il y collaborait avant qu'elle meure il y a trois ans: «Ce ne sera pas que du gospel traditionnel, il y aura aussi des chants arabes, hébreux, zulu...» Il compte aussi s'attaquer à un autre projet, Through the Eyes of Wonder, une «performance visuelle» qu'il veut présenter de par le monde. «Si tout va bien, je pourrai faire mon album de jazz entre les deux», a-t-il ajouté.

Interrogé sur le programme de la soirée, l'artiste a réitéré qu'il était un grand fan de jazz, ajoutant qu'il reprendrait sûrement le classique All Blues de Miles Davis, en plus de ses succès dont Superstition, mais qu'il se laisserait guider par son inspiration et par la réaction du public.

Parlant de Miles Davis, Alain Simard et André Ménard, visiblement émus, lui ont remis le Spirit Award, un bronze inspiré de l'autoportrait que Davis a donné au festival de jazz montréalais. Ce trophée remis à un artiste innovateur et influent (Paul Simon, Bob Dylan et Leonard Cohen), non seulement Stevie Wonder l'a-t-il accepté en main propre, ce que n'ont pas fait tous les lauréats précédents, mais quand Simard a voulu l'en débarrasser pour lui permettre de mieux répondre aux questions, Wonder l'a arrêté sec: «Touche pas à mon trophée!»

Non, Stevie Wonder n'est vraiment pas comme les autres.