Les 12 membres de Pink Martini étaient tirés à quatre épingles mardi soir à la salle Wilfrid-Pelletier. Et pour cause : pour leur premier concert en deux ans à Montréal, ils s'offraient un orchestre d'une cinquantaine de musiciens sous la direction de Mélanie Léonard.

Le programme de la soirée était plutôt éclectique: des succès du collectif de Portland, dont Sympathique très tôt dans la soirée et Lilly au rappel, mais surtout des pièces archi-connues - musiques latines, airs d'opérette ou d'opéra - qu'ils récupèrent la plupart du temps avec bonheur.

Parmi les nouveautés, leur composition Splendor in the Grass, qui sera de leur quatrième album prévu en octobre, est un peu le condensé de la vraie nature de Pink Martini : une chanson qui pourrait être des Carpenters, avec un emprunt à Tchaïkovski, et qu'ils ont coiffée du titre d'un film américain d'il y a 50 ans.

Ce mélange des genres, assaisonné de nostalgie, a fait le succès de Pink Martini. Quand il reprend une pièce de répertoire, le public y trouve habituellement ses repères, en commençant par la version tout en douceur de Quizàs, Quizàs, Quizàs qui a parti le bal.

Je pense aussi aux deux airs d'Ernesto Lecuona, Andalucia et Malaguena, qui leur ont valu de chauds applaudissements. Le public reçoit cette musique comme un immense bonbon : la menace d'une overdose de sucre est toujours présente, mais Pink Martini s'en tire à cause de son savoir-faire et de son goût certain. Et une fois cette zone de confort installée, il peut se permettre une chanson turque, ou japonaise, tout à fait dans le ton de la soirée.

Tel que promis, China Forbes, très élégante dans sa robe de soirée, a renoué avec l'opéra qu'elle chantait aux petites heures du matin avec le pianiste Thomas Lauderdale quand ils fréquentaient l'université. Elle a choisi Ebben ne andro lontana de La Wally de Catalani, qu'on associait à la Callas avant que le film Diva et Wilhelmenia Fernandez ne la récupèrent. Ce faisant, la chanteuse de Pink Martini nous a rappelé qu'elle a une voix puissante et juste que ne met pas souvent en valeur le répertoire de son groupe.

Lauderdale, lui, a été fidèle à lui-même, grandiloquent dans sa gestuelle comme un Liberace des temps modernes, mais sympathique et spontané quand, comme Forbes, il nous a fait la conversation en français.

Pink Martini a surtout réussi hier une brillante intégration du grand orchestre à sa disposition. Les 12 membres du collectif Portland faisaient vraiment corps avec la cinquantaine de musiciens derrière. Par contre, le parti pris orchestral a sans doute enlevé un peu de swing au répertoire du groupe. Le public, qui ne demandait pas mieux que de faire la fête, est véritablement sorti de sa torpeur quand Brazil a embrasé la salle au premier rappel. Tant et si bien que Forbes, Lauderdale et compagnie sont revenus faire un deuxième rappel, sans orchestre cette fois.

Pink Martini remet ça mercredi soir, même heure, même poste, mais ce deuxième concert affiche complet.