Tous les ingrédients d'un succès pop français y sont. Succès québécois? Fouillez-moi mais... 45 000 albums plus tard, on doit se rendre à l'évidence. L'espace francophone de 2009 rapprocherait-il les continents si peu compatibles depuis des lustres? Force est de constater que l'impact viral de Béatrice Martin, alias Coeur de pirate, est palpable des deux côtés de la flaque.

Hier à l'Astral, en tout cas, on pouvait le constater... sans conclure à quelque performance mémorable. Sans conclure à quelque bouleversement. Si peu de métier ne peut mener un coeur de pirate dans la Cour des miracles!

Quoi qu'on pense de cette ténuité sur scène et ces clapotis au piano (quand même plus assurés qu'à la première partie de Benjamin Biolay il y a exactement un an), la propulsion de miss Coeur de pirate au firmament de la pop est spectaculaire, pour employer un euphémisme.

Essayons de comprendre le virus: petit mythe de l'adolescente farouche qui pose nue et dont on peut repérer le shooting en 12 secondes sur l'internet, français normatif qui témoigne d'une bonne éducation dans les hauteurs montréalaises, tatouages de pirate sur les bras (assez classique de nos jours), tronche remarquablement séduisante, dégaine à la fois ingénue et sensuelle (même assise au piano, ça le fait), petite robe, petite veste, chaussures sans talon, petite voix sensuelle, un peu dans le nez, avec une certaine projection et un chuintement prononcé dans la prononciation.

«Je suis Coeur de pirate et ça fait très longtemps que je n'étais pas venue à Montréal», nous indique d'entrée la petite blonde à la mèche rebelle, à peine sortie de l'adolescente mais qui semble avoir du vécu, malgré une enfance et une puberté passées dans la ouate. Coeur de pirate dans la ouate, pour ainsi dire.

Cinq musiciens derrière la nouvelle star de notre pop indé, instrumentation folk-rock indé, des violons, des claviers délicats, des guitares, des percussions discrètes, de bonnes mélodies, que des ballades d'amour et de peines d'amour entrelacées, ponctuées de quelques titres up tempo assez mollos, tout compte fait.

Le répertoire d'un album avec quelques reprises et quelques inédites offertes en cadeau: Le long du large, Fondu au noir, La vie est ailleurs, Ensemble (qui parle paradoxalement de rupture, nous fera remarquer la chanteuse), Francis (portrait assez touchant de son meilleur ami qui se trouve dans la salle), une reprise pianotée de Malajube (Étienne D'Août), quelques inédites comme la country Loin d'ici ou Place de la république, saupoudrée de portables allumés dans le parterre et arrosée par quelques larmes de l'interprète.

Surgira (en rimes) le mec éblouissant du Vans Warped Tour qui aurait mal vieilli, constate l'auteure de Printemps. La chanteuse entonnera aussi Pour un infidèle avec Jimmy Hunt, le même interprète de l'album éponyme. Le crescendo culminera avec Comme des enfants, reprise à l'unisson par une partie du public.

Prêts pour le rappel? Ben quin.

Béatrice Martin enchaînera Le Corbeau, puis J'ai demandé à la lune, une reprise d'Indochine, pour finalement s'asseoir au bord de la scène avec son guitariste et coiffer le tout d'une version chétive d'Umbrella, mégatube de Rihanna... que Mandy Moore et Jamie Cullum ont déjà reprise... et que Coeur de pirate s'approprie à sa hauteur.

À hauteur de pirate?

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Dans le cadre des FrancoFolies, Coeur de pirate se produit chaque soir à l'Astral jusqu'au dimanche 2 août.