Pas facile pour quelqu'un qui a vu Mutantès à l'été 2008 et de nouveau en février dernier d'aborder le nouveau spectacle de Pierre Lapointe avec un regard totalement neuf.

Sentiments humains, l'album, étant constitué de chansons tirées de Mutantès, il est tout naturel que le spectacle que le chanteur en a tiré contiennent plusieurs titres entendus dans son spectacle à grand déploiement créé aux FrancoFolies.

Dimanche, au Métropolis, Pierre Lapointe avait troqué son habit de cosmonaute pour un jean, un t-shirt et une redingote stylisée, mais au look plus terrien. Sept musiciens l'entouraient et, sauf erreur, chacun d'entre eux était de l'expérience Mutantès. Impossible de le nier, tout ça avait un air de déjà vu.

L'extraction a toutefois réussi. De Mutantès, Pierre Lapointe garde une envie de faire plus rock. Plus lourd, même, comme on a pu le constater durant L'endomètre rebelle et L'enfant de ma mère, sans doute la chanson où son énergie se rapproche le plus de l'agressivité du rock'n roll. Son groupe mettait tout son poids dans les guitares (Philippe B. et Joseph Marchand), la basse (Philippe Brault) et la batterie (Tony Albino). Une pression que le chanteur soutenait toutefois sans peine.

Des incontournables

Ce long spectacle - dont j'ai vu les deux dernier tiers - a bien sûr été ponctué de nombreux moments plus légers. On pense à Au bar des suicidés, qui est peut-être sa chanson la plus facile, mais aussi à ces moments où il s'est installé seul au piano ou qu'il a interprété des chansons plus simples comme la désormais incontournable Je reviendrai.

Vers la fin du programme, Pierre Lapointe a servi une autre chanson qu'il ne peut pas ne pas faire: Deux par deux rassemblés. La mélodie du refrain, imparable dans sa version originale, avait été déconstruite et était interprétée par un trio de flûtes à bec. Quiconque a assisté à Mutantès a saisi que ce nouvel arrangement découle de celui concocté pour le spectacle de l'an dernier où un choeur remplaçait les violons. Sauf qu'à choisir entre le choeurs et les flûtes à bec, on vote pour le choeur, qui était plus agréable à entendre...

Sentiments humains, le spectacle, ne laisse pas de doute quant à la vitalité des dernières chansons de Pierre Lapointe hors de Mutantès. Il donne toutefois aussi l'impression que le chanteur est encore en train d'apprivoiser son personnage de rockeur. Il arpente souvent la scène le corps rigide, comme s'il ne savait pas encore comment incarner la part d'agressivité insufflée dans ses chansons récentes.

Le revoir sur scène a cependant été un réel plaisir pour une raison toute autre que ses chansons. Dans Mutantès, il ne disait pas un mot. Dimanche, il avait retrouvé la parole. Il s'est donc permis des bouffonneries (notamment à propos de qui «porte le poil» dans son groupe et... où) et a renoué avec son rôle de chanteur baveux qui en irritent plusieurs, mais dans lequel il excelle.