Notre journaliste Alain Brunet fait son bilan des 21es FrancoFolies.

Les deux meilleures minutesQuand La Comète, l'inédite de Dédé Fortin, a été dévoilée au spectacle Poussières d'étoiles (en extérieur sur la place des Festivals), on aurait pu découper d'épaisses tranches d'émotion tellement l'atmosphère était chargée.

Les deux pires minutes

Quand, en une seule chanson, la chanteuse du groupe réunionnais Zong (en première partie du Roi Poisson) a parcouru le répertoire entier des clichés de la gestuelle rock.

La révélation

Julien Doré. Bon, j'ai raté Keith Kouna et Bernard Adamus et plein d'autres. Dans ce que j'ai vu et entendu, Le Roi Poisson est la révélation québécoise, mais Julien Doré remporte la palme francofolle. Ce jeune Français est indéniablement pop, il est aussi très rock, n'hésite pas à faire le ventricule gauche de notre Coeur de pirate (jolis duos!), peut grimper jusqu'au balcon pour y faire de remarquables sparages. Un «naturel» des planches, c'est certain. Qui plus est, son groupe peut mettre la pédale à fond et ainsi générer la transe des meilleures soirées. Pour les bonnes raisons, ça marche et marchera à grande échelle.

La fausse bonne idée

Croire que feu Alain Bashung serait honoré mur à mur à travers la programmation. Sauf exception, la dédicace ne s'est pas matérialisée sur scène. Manquait aussi un spectacle-concept...

La meilleure blague

Beau moment d'autodérision quand Gaston Miron, dont on a diffusé des extraits d'interviews pendant le spectacle 12 hommes rapaillés, a confié répondre régulièrement aux deux questions suivantes à cause de sa réputation: «Toi, Miron, tu dois faire de l'argent, non? Tu dois aussi avoir les femmes que tu désires?» Et le poète de répondre, sourire en coin: «Je n'ai ni l'un ni l'autre.»

En résumé

Le partage des tâches journalistiques étant ce qu'il est, je n'ai pas reçu de grande claque aux Francos... jusqu'à samedi. Alors là... Un «orchestre de chambre d'attitude rock» a transcendé ce qu'on avait pu apprécier de ces 12 chanteurs rapaillés par la poésie de Miron. Ça aurait pu être un enchaînement d'interprétations, un événement vécu dans le respect, sans plus. En ce qui me concerne, ce fut un moment d'anthologie. Ce à quoi avaient pensé Gilles Bélanger et Louis-Jean Cormier nous a menés à une exploration insoupçonnée, incontestablement magnifique. Grande substance poétique pour matière première, musiques créatives, audacieuses et accessibles, arrangements fins, instrumentation singulière, toujours cette intention de sobriété, toujours ce caractère collectif et multigénérationnel, ce casting idéal. Jusqu'à 17 artistes sur scène, tous au service d'une oeuvre ancrée dans l'imaginaire québécois. Chapeau.