Montréal et 2000 fans de soul ont reçu lundi soir la plus importante tournée néo-soul/r&b de l'heure, mettant en vedette la star John Legend, précédé d'India.Arie en première partie.

S'il faisait bon fuir la canicule pour l'air climatisé du Métropolis pendant quelques heures, c'est parce que Legend n'est pas le genre d'artiste à faire grimper la température...

Une grosse machine que celle de John Legend, un peu à l'étroit sur la scène somme toute modeste du Métropolis, compte tenu de la notoriété du type.

Legend, 30 ans, est la nouvelle coqueluche r&b américaine, fameux compositeur de ballades soul, la voix de mille et une collaborations (avec Jay-Z, Kanye West, will.i.am, Estelle, T.I., Mary J.Blige et plus encore) qui ont gravi les échelons du palmarès Billboard.

Ça, c'est Legend en studio, sur les plateaux de télé et les galas (déjà six Grammys à son actif). Sur scène, le chétif musicien en impose pas mal moins.

Une dizaine de musiciens étaient déjà à l'oeuvre, enfilant les premières mesures de Used to Love U, extrait de son premier album, Get Lifted (2004). Trois choristes (ses Legendettes?), trois musiciens aux cuivres, un guitariste, un claviériste, un bassiste, un batteur et un système d'éclairage très poussé, rehaussé par un écran de lumières LED. En grosses lettres, c'était écrit «Holla!» au moment où la star s'est approchée du micro, le regard voilé par de grands verres fumés.

Du coup, on a attribué le manque de clarté de la voix de Legend à la sonorisation. La chanson, un truc soul assez entraînant mû par un jeu de batterie de facture hip-hop, était peut-être un peu trop chargée pour qu'on puisse profiter de cette voix doucement granuleuse, un baryton au timbre ambré plus à l'aise dans les registres bas.

Or, sauf à quelques trop rares occasions où Legend, derrière les ivoires du beau piano à queue qui trônait au centre de la scène, chantait la pomme dans ce style qui a fait sa renommée, on n'a que très peu entendu sa voix.

Faut-il y voir le symptôme d'autre chose? Adorable sur disque (bien qu'Evolver, son troisième et plus récent, n'ait pas remporté le succès des deux premiers), Legend n'est pas tout à fait à l'aise sur scène. Lorsqu'il est debout derrière son micro, chacun de ses gestes semble avoir été appris par coeur et exécuté de façon mécanique.

Le public est enthousiaste, certes, mais on n'ose imaginer la folie qui aurait régné si la star avait autre chose que ce charisme discret à déployer sur scène. Reste ses chansons, inspirées par Marvin Gaye (sans la tragique passion) et Al Green (sans la voix immaculée).

Pigeant dans sa courte discographie, le musicien décline sa soul tantôt sur des accents modernes (l'excellente It's Over et son sample du vieux groupe disco-funk Freedom, Quickly, en duo avec sa choriste), tantôt en rendant hommage à l'âge d'or du soul (Satisfaction, Magnificent), touchant même, d'heureuse manière, au reggae avec No Other Love.

Sur le mode «classique», John Legend se décoince enfin lorsqu'il invite une spectatrice à monter sur scène pour lui chanter à l'oreille Slow Dance, de l'album Once Again (2006). Ça dansait collé collé, sous les cris des centaines d'admiratrices!

Un peu plus tard, l'énergie a monté d'un cran pendant Good Morning, Change For You et cette reprise fort bien interprétée du I Want You des Beatles. En clair, la fin du concert, ainsi que son rappel, ont été à la mesure de la renommée du chanteur.

En première partie, India.Arie a donné une performance agréablement allumée d'une sorte de soul-pop qui sentait fort le patchouli. Très «Peace&Love», la demoiselle à la voix forte et suave, très simplement accompagnée, notamment d'un guitariste qui occupait beaucoup d'espace dans ses chansons.

Attachante communicatrice, elle conversait avec ses fans entre les chansons, allant jusqu'à pousser la note au milieu du parterre, entourée de ses fans qui faisaient mille acrobaties pour pouvoir la prendre en photo avec leurs téléphones portables.