André Ménard se souvient encore de son premier contact avec Kate McGarrigle au début des années 70. «Alain Simard et moi, on avait une boîte à l'entrée du Spectrum qui s'appelait le El Casino, raconte le cofondateur du Festival de jazz. On produisait le premier spectacle de Kate et sa soeur Anna depuis leur succès américain. J'avais dû apprendre à vivre avec le code McGarrigle. Il y avait toujours une certaine désorganisation avec elles. Elles n'étaient pas organisées, mais elles étaient touchées par la grâce. À 17 h, on ne savait pas encore où placer l'orgue. Mais on savait qu'à 20 h, dès le début du show, tout irait bien.»

Il parle avec émotion de l'artiste, mais aussi de la femme. «En fait, les deux étaient indissociables, explique-t-il. Son oeuvre et sa vie étaient fusionnées. Son approche était très bohème. Elle ne calculait jamais les choses en fonction d'une quelconque carrière. Avec elle, on ne parle pas de showbusiness. On parle d'art. Ça faisait du bien de rencontrer une personne comme cela.»

L'art des soeurs, Jim Corcoran l'a découvert au début des années 70 quand un ami lui a fait écouter leurs disques. «J'ai immédiatement trouvé cela extraordinaire, raconte-t-il. Elles avaient leur propre son, avec une façon très singulière d'harmoniser leurs chansons. Puis, quand j'ai réalisé qu'elles étaient québécoises, ça m'a surpris. J'avais souvent vu leur nom sur les disques d'artistes comme Linda Ronstadt, qui reprenaient leurs chansons. Je présumais donc qu'elles étaient californiennes ou quelque chose comme cela. (...) C'est plus tard que j'ai découvert leurs chansons en français. Elles mélangeaient le français et l'anglais à une époque où ce n'était pas aussi évident. Mais je ne pense pas qu'elles le faisaient pour des raisons politiques. Elles s'exprimaient, simplement.»

Philippe Tatartcheff, parolier de longue date pour Kate et Anna (notamment les disques Entre Lajeunesse et la sagesse et La vache qui pleure), tient à rappeler le rayonnement international de Kate McGarrigle et de sa soeur. «Elles ont fait beaucoup pour le Québec. Grâce à elles, dans les années 70, on entendait déjà des chansons en français sur les scènes des États-Unis, de Calgary et des autres villes du Canada anglais.»

La famille

Robert Charlebois se souvient particulièrement de l'étroite complicité entre Kate et sa soeur Anna. «Je n'ai jamais croisé l'une sans l'autre, nous a-t-il écrit par courriel. Toutes mes pensées vont à Anna, et à leurs enfants que je connais moins et que j'aime de loin.»

Les McGarrigle et leurs enfants forment un peu la famille royale de la musique montréalaise, rappelle André Ménard. «Et Kate en était la reine, la chef de clan», ajoute-t-il. Jim Corcoran estime que les soeurs McGarrigle ont autant marqué leurs pairs musiciens que d'autres Canadiens comme Joni Mitchell ou même Leonard Cohen. «Mais elles sont moins connues du grand public, explique-t-il, car elles faisaient moins de spectacles. Kate voulait s'occuper de ses enfants, et on voit le résultat avec ce que Rufus et Martha font aujourd'hui.»

Comme tous les autres interviewés, André Ménard pensait hier aux enfants de Kate. «Connaissant la très grande sensibilité de Rufus et Martha, je pense très fort à eux.»

 

Discographie

- Kate & Anna McGarrigle (1975)

- Dancer With Bruised Knees (1976)

- Pronto Monto (1978)

- Entre Lajeunesse et la sagesse (French Record) (1981)

- Love Over and Over (1982)

- Heartbeats Accelerating (1990)

- Matapedia (1996)

- The McGarrigle Hour (1998)

- La vache qui pleure (2003)

- The McGarrigle Christmas Hour (2005)