Il a donné des centaines de concerts à l'étranger, mais trop peu dans sa propre ville. Le pianiste montréalais Wonny Song entend bien revenir à ses racines en jouant désormais plus souvent au Canada et à Montréal. Il en fera la démonstration jeudi prochain, en compagnie de l'orchestre de chambre I Musici de Montréal et du violoniste Alexandre da Costa.

Wonny Song n'a que 30 ans. N'empêche, il a déjà une carrière internationale bien entamée. Elle a pris son envol surtout il y a cinq ans, après qu'il eut gagné le Young Concert Artists International Auditions, un concours américain à la suite duquel les récitals se sont enchaînés à un rythme fou, principalement aux États-Unis, en Europe et en Asie.

 

« J'avais déjà participé à plusieurs concours, mais le Young Concert est particulier, dit-il. On n'y attribue qu'un seul prix, que tu remportes seulement s'ils croient que tu peux avoir une carrière internationale. Ensuite, ils t'aident à la développer. « C'est ainsi qu'il s'est retrouvé à jouer deux fois au prestigieux Carnegie Hall de New York et au Kennedy Center à Washington.

Au moment de rencontrer La Presse, il revenait tout juste d'une tournée des cinq plus grandes villes du Japon. Maintenant qu'il est bien établi sur la scène internationale, il éprouve le besoin de jouer plus souvent chez lui, au Canada, et surtout à Montréal.

« Je veux trouver un meilleur équilibre entre ma carrière internationale et celle que je mène ici, dit-il. C'est un plus petit marché, mais, pour moi, jouer dans ma ville est d'une importance primordiale, parce que c'est ici que j'ai mes racines. J'ai eu une chance inouïe de grandir à Montréal, car cela m'a permis d'avoir de merveilleux professeurs. Si j'avais vécu dans mon pays natal, je ne serais sans doute pas devenu pianiste. «

Né en Corée du Sud, il est arrivé à Montréal avec sa famille à l'âge d'un an. Il a fait ses débuts au piano à 8 ans, auprès de Yolande Gaudreau. « Je ne démontrais pas de disposition particulière pour la musique, raconte-t-il. Mais mes parents pensaient qu'un enfant a besoin d'une éducation variée, alors je faisais du piano, de la natation et du taekwondo. « Sa première année au piano fut même laborieuse, au point que ses parents durent un peu le forcer pour qu'il persévère, avoue-t-il avec amusement !

« Ce n'est qu'après deux ou trois ans que j'y ai vraiment pris goût, une fois que j'ai commencé à maîtriser la technique et à comprendre la musique, se souvient le pianiste. C'est à ce moment-là que je me suis mis à progresser très vite. « Si vite qu'il remportait le grand prix au Concours de musique du Canada à 11 ans, et le Concours de l'OSM à 16 !

Mais à l'âge adulte, c'est surtout le Prix d'Europe, remporté en 2003, qui l'a révélé aux mélomanes d'ici. Et depuis un peu plus d'un an, il s'est fait connaître auprès d'un plus large public grâce à sa participation au troisième coffret des grands classiques d'Edgar Fruitier, un énorme succès populaire.

Le pianiste a eu l'occasion d'en mesurer l'impact lors d'un incident cocasse survenu en rentrant de l'étranger. « Le douanier, un homme avec des tatouages qui ne correspondait pas du tout à l'image que l'on peut se faire d'un mélomane, m'a demandé : êtes-vous le Wonny Song du coffret d'Edgar Fruitier ? « raconte-t-il en riant.

En concert avec I Musici et da Costa

Wonny Song et le violoniste Alexandre da Costa se connaissent depuis longtemps. Ils sont devenus bons amis quand ils étudiaient à l'Université de Montréal, mais s'étaient perdus de vue. C'est Pierre Dionne, le responsable de la section classique des Disques XXI-21 décédé il y a à peine un mois, qui leur a suggéré de jouer ensemble en 2008. Depuis, ils collaborent régulièrement et enregistreront cet été l'intégrale des sonates pour piano et violon de Brahms avec cette maison de disques.

D'ici là, ils nous offrent avec les Musici une pièce rarement jouée : le Concerto pour piano et violon en ré mineur de Mendelssohn. « C'est une oeuvre très difficile pour les deux instruments, dit Wonny Song. Dans le second mouvement, l'orchestre joue très peu, ce qui donne presque l'impression qu'il s'agit plutôt d'une sonate. C'est un défi de maintenir constamment l'intérêt, car l'oeuvre est très longue. On doit faire en sorte que cela ne se sente pas. «

Fait à noter : les Musici seront dirigés par un chef invité, l'Espagnol Jesus Amigo. Par ailleurs, les deux musiciens joueront de nouveau ce concerto avec I Musici de Montréal en avril prochain à Carnegie Hall. Plus près de nous, Wonny Song jouera également avec la Sinfonia de Lanaudière le 21 mars. L'interprète travaille aussi sur un projet ambitieux : l'intégrale des sonates de Mozart, dont l'enregistrement aura lieu à l'automne.

Wonny Song, I Musici de Montréal et Alexandre da Costa, le 18 février, 20h, à la salle Pollack de l'Université McGill.