On pourrait dire sans risque de se tromper que le spectacle de la cérémonie d'ouverture du pavillon canadien à l'Expo universelle de Shanghai, samedi soir, a été celui d'Alain Lefèvre. Le pianiste serait pourtant le premier à protester. Pour lui, ce concert avec l'Orchestre symphonique de Shanghai, sous la direction de Jean-Philippe Tremblay, était d'abord et avant tout l'affaire d'André Mathieu.

C'est un Lefèvre visiblement ému que nous avons rencontré dans sa loge après la soirée. «Ce fut une semaine très stressante pour moi: Montréal (le même Concerto No 4 de Mathieu avec l'OSM), trois concerts de suite en Abitibi, un saut à Paris et pouf! je me suis retrouvé à Shanghai. Je me suis demandé comment ça allait se passer entre Mathieu et les Chinois. Mais dès la première répétition, les musiciens applaudissaient, ils étaient émus. Et ce soir, le plus beau compliment pour nous, ils étaient sur le bout de leurs chaises!»

Pas si mal pour l'oeuvre d'un compositeur québécois dont ces musiciens ne savaient absolument rien. Lefèvre ajoute : «Et il y a cette tribune qu'on a eue en Chine: j'ai fait deux ou trois émissions de télé, dont une avait une cote d'écoute de 40 millions d'auditeurs. Quarante millions de personnes en Chine ont entendu André Mathieu et depuis deux jours, sur mon site internet, on est dans le tapis! C'est donc mission accomplie.»

Quand, il y a deux ans et demi, François Macerola et le Cirque du Soleil lui ont demandé ce qu'il voudrait jouer s'il participait à l'ouverture du pavillon canadien à Shanghai, Lefèvre a tout de suite proposé André Mathieu. «En 2010, bizarrement, c'est probablement le compositeur dont on va le plus parler à travers la planète», renchérit le pianiste qui ira bientôt le faire entendre à Londres et Berlin. Et voilà Varsovie qui le réclame dans deux ans!

Fait exceptionnel, c'est à Shanghai que sera présentée dimanche la première mondiale du film québécois sur Mathieu, L'enfant prodige, dont Lefèvre interprète la musique en plus d'y avoir agi comme conseiller. Le scénariste-réalisateur Luc Dionne assistait d'ailleurs au concert d'hier, en compagnie du comédien qui incarne Mathieu, Patrick Drolet, des producteurs Denise Robert et Daniel Louis, du monteur Jean-François Bergeron et d'une forte délégation de gens d'affaires et de culture de chez nous.

Dans la salle rutilante de l'Expo Centre, qui n'en était qu'à son deuxième spectacle, ils ont vu tour à tour Marie-Jo Thério, d'abord seule au piano puis accompagnée de l'orchestre de Shanghai pour une nouvelle chanson en anglais, la troupe autochtone de danse, théâtre et musique de l'Ontario Red Sky Performance ainsi qu'un numéro de main à main tiré du spectacle Zaia que le Cirque du Soleil présente à Macao. Les liens entre les numéros étaient tissés habilement par des artistes du Cirque qui font de l'animation au pavillon canadien dont le Cirque, on l'a dit, est le concepteur et le responsable de la programmation culturelle.

Des spectacles comme celui de samedi, il y en aura quatre autres d'ici la fin de l'Expo en octobre. À la différence qu'hier, il était présenté sur invitation seulement et que contrairement à Marie-Jo Thério, Red Sky Performance et les artistes à venir d'ici la fin octobre, le concert de Lefèvre et le numéro de Zaia ne seront pas donnés en plein air pendant une semaine. Normal, c'était soir de gala et, comme l'a fait remarquer l'animateur Dashan, un humoriste canadien adulé par les Chinois, l'occasion tout indiquée de célébrer 40 ans de relations entre le Canada et la Chine. Les ballons multicolores suspendus au-dessus de l'orchestre étaient là pour nous le rappeler.