Né en Angleterre et établi dans la campagne française, Piers Faccini a collaboré aussi bien avec Ben Harper qu'avec Patrick Watson. Il s'amène à l'Astral, jeudi, avec ses guitares, son harmonica et un batteur italien pour nous offrir ses chansons nourries de folk anglais, de blues américain et de musique africaine. Rencontre avec une voix en liberté.

«Je suis anglo-saxon de culture, mais pas dans mon sang», dit Piers Faccini, dont les parents ont des racines italiennes et russes et qui vit avec sa femme italienne et ses deux enfants dans les Cévennes, une heure au nord de Montpellier. Il est revenu s'installer en France, où il avait vécu de l'âge de 5 à 10 ans, quand il a décroché un contrat de disques avec Label Bleu grâce à un ami, le violoncelliste Vincent Ségal.

Il ajoute: «Une artiste avec qui j'ai toujours senti un peu d'affinités, même si je ne l'ai malheureusement pas rencontrée, c'est Lhasa. Cette espèce de truc un peu apatride et le fait qu'elle pouvait vachement bien chanter dans des langues différentes. Je chante en italien de temps en temps, en napolitain, mais la langue anglaise est celle avec laquelle je m'exprime et dans laquelle j'adore écrire.»

Je rencontre Faccini dans sa loge du Cap, la petite salle de spectacle de ce qu'on appellerait ici une maison de la culture, en banlieue de Paris. Il vient de jouer pendant une heure et quart, avec le batteur romain Simone Prattico, une musique lumineuse, organique et sentie par-dessus laquelle il a laissé flotter sa voix, tantôt douce, tantôt puissante. Sous le charme, le public lui a réclamé un rappel qu'il est venu offrir a cappella.

Faccini n'en sera pas à sa première visite chez nous, jeudi à l'Astral; je vois d'ailleurs une lueur dans son regard quand il me parle du «souvenir extraordinaire» d'un spectacle au Théâtre St-Denis avec son pote Ben Harper. La filière montréalaise ne s'arrête pas là. Le 2 juillet dernier, aux Eurockéennes de Belfort, en Suisse, Faccini a joué avec Patrick Watson, la chanteuse Sophie Hunger et un orchestre constitué d'élèves des écoles de musique de la région. Un spectacle inédit dont on sent qu'il le referait bien si on le lui proposait.

Des amis en musique

Faccini a plein d'amis et de complices en musique. Comme Ben Harper, on l'a dit, qui a collaboré à son deuxième album (Tearing Sky, 2006) dont l'édition limitée comprend le classique de Dylan, Masters of War, qu'ils chantent en duo. Son troisième album, le très beau Two Grains of Sand (2009), il l'a réalisé avec Renaud Letang, une pointure de la musique de qualité en France, et il n'est pas impossible qu'il travaille éventuellement avec John Parish, acolyte de PJ Harvey: «Mais je ne suis pas encore prêt à travailler avec quelqu'un qui va amener sa touche à lui. Il faut juste que j'aille à la fin de là où je suis allé sur Two Grains of Sand

Mais Piers Faccini est déjà rendu ailleurs. Son quatrième album est déjà très avancé - il en jouera d'ailleurs des extraits à l'Astral - et les chansons de ses trois premiers disques sont littéralement transformées dans son spectacle actuel. Sa musique puise dans un «triangle d'influences»: le folk britannique (John Renbourn, John Martyn, Bert Jansch, Richard Thompson, Nick Drake), le blues noir américain (Skip James, Mississippi John Hurt, Son House et Muddy Waters, dont il reprend I Can't Be Satisfied) et la musique de l'ouest de l'Afrique.

Mais il ne donne pas pour autant dans l'exotisme. «Pour moi, ce sont les chansons avant tout, souligne-t-il. Dans Your Name No More, je voulais juste exprimer un truc très simple: George Bush était toujours au pouvoir et je voulais illustrer l'absurdité de dire: «Ma raison, c'est la raison, mon dieu, c'est le dieu, et ma parole, c'est la parole.» Très naturellement, j'ai trouvé ce rythme, un peu nord-africain, un peu guerrier.»

Il y a aussi dans la musique de Piers Faccini - et c'est particulièrement vrai en concert - un espace qui permet à sa voix, son instrument de prédilection, de s'exprimer en toute liberté. «Le seul instrument du monde qui peut porter une mélodie et des paroles en même temps, c'est la voix, dit-il. C'est tout bête, mais, en fait, c'est ça, la magie d'une chanson.»

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PIERS FACCINI, à l'Astral, le 28 octobre.