Le Conseil québécois des gais et lesbiennes (CQGL) trouve ridicule la décision de censurer la chanson Money for Nothing du groupe Dire Straits sous prétexte que certaines de ses paroles sont homophobes.

De l'avis du PDG de l'organisme, Steve Foster, le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR) a clairement manqué de jugement en interdisant la diffusion de l'oeuvre satirique de 1985 parce qu'elle contient le mot «faggot» - l'équivalent en anglais de «tapette».

À ce compte-là, il faudra interdire toute l'oeuvre du romancier Michel Tremblay, a-t-il ironisé, en entrevue à La Presse Canadienne. «Il va falloir faire une chasse aux sorcières, il va falloir réécouter toutes les chansons dans l'histoire du monde, on va réécrire tous les livres qui existent dans le monde.»

M. Foster est d'autant plus indigné que le CCNR n'a pas jugé bon de blâmer les commentateurs sportifs Claude Mailhot et Alain Goldberg, qui avaient critiqué pendant les Jeux olympiques de 2010 l'apparence du patineur artistique américain Johnny Weir, dont ils ont même mis en doute la masculinité.

C'est un peu comme si le CCNR avait conclu qu'on peut dire n'importe quoi sur une personne, à condition de ne pas utiliser les mots «fif», «tapette» ou «faggot», a martelé M. Foster.

Le CQGL craint que la controverse entourant Money for Nothing ne mine la crédibilité des organismes qui luttent avec sérieux contre la discrimination et la violence. Ces histoires «farfelues» font couler beaucoup d'encre, au détriment de causes plus importantes et plus graves, a expliqué M. Foster. «Les gens vont penser qu'on crie au loup à tout bout de champ. C'est problématique», a-t-il fait valoir.

La décision du CCNR fait suite à une plainte d'une auditrice de la station CHOZ-FM à Saint-Jean, Terre-Neuve-et-Labrador.

Un comité du conseil a conclu que même si le terme «faggot» a pu avoir été acceptable à un moment donné dans le passé, il est aujourd'hui devenu inacceptable dans la majorité des circonstances. Le comité note également que la diffusion de Money for Nothing serait acceptable si la chanson était «convenablement modifiée».

Ce jugement rendu la semaine dernière a été vertement critiqué. Des stations de radio de Halifax et d'Edmonton ont joué la chanson en boucle pendant une heure, en fin de semaine, afin de manifester leur désaccord.