Que pourraient chanter, ensemble, Martin Deschamps, Éric Lapointe et Jonas sans qu'aucun des trois n'ait l'air déplacé? Des affaires de rocker? Vous chauffez... De rouleur? Vous brûlez... Ceux qui ont dit Chu un rocker, avancez devant la scène Ford où les FrancoFolies présentent ce soir le spectacle Gerry - Toujours vivant, à l'occasion de la sortie du film du même nom.

«C'est un hommage à un artiste que les Québécois aimaient et admiraient», lance Mouffe à qui on a confié la mise en scène de ce spectacle. «On a choisi des chansons de toutes les époques, de Câline de blues du temps d'Offenbach à Toujours vivant, son grand succès solo. Et c'est exactement ça qu'on a voulu mettre sur la scène: un hymne à la vie.»

D'après ce qu'on a vu hier en répétition générale - la seule - au Métropolis, la grande scène des Francos ne manquera pas de vie ce soir (21h) alors que se succéderont sur scène, pour des prestations solo, en duo ou en trio les susnommés Deschamps, Lapointe et Jonas, de même que Nanette Workman, Bobby Bazini, Sarah Bourdon et Mario Saint-Amand, qui tient le rôle-titre dans Gerry, le film.

«Je n'ai pas connu Gerry, je ne l'ai même jamais vu en show, mais, en lisant son livre (la biographie signée Mario Roy, en fait), j'avais l'impression de voir mon propre futur», nous dira Martin Deschamps qui fait carrière en chantant Gerry. «J'aime l'énergie qui se dégage du show, ici...»

L'énergie, au départ, émane du band de Deschamps, machine puissante et précise qui accompagne les autres interprètes: section rythmique impec, le directeur musical Bernard Quessy aux claviers, saxo et trompette derrière deux guitaristes top niveau: Louis Mercier et Ricky Paquette, le jeune crack de 20 ans. Quand Stéphane Dufour, l'accompagnateur d'Éric Lapointe, est sur scène, il y a trois guitaristes: «Je r'viens toujours au rock'n'roll!»

«Sur disque, j'aimais bien le mariage Johnny Gravel-John McGale à la guitare, souligne Ricky Paquette. Gravel avait un son cru, très seventies, tandis que McGale avait un style plus élaboré. Ils se complétaient bien.»

Éric Lapointe, lui, passe d'un grand orchestre à un autre en l'espace de 72 heures: vendredi, il a réalisé l'un des rêves de sa vie en se produisant avec l'OSM. «J'étais nerveux: fallait que je marche droit... Avec les gars de ton band, tu peux t'égarer un peu, ils vont te ramasser. Mais avec une formation comme l'OSM, il n'y a pas de place à l'impro.» Mais ça fait une belle scène de film... «Je ne sais pas si je vais mériter un film comme Gerry. Moi, le film de ma vie, il est dans mes chansons.»

Le film Gerry aussi, il est dans les chansons et certaines serviront d'intro aux chansons interprétées sur scène, comme ce Promenade sur Mars qui, dans sa grande finale harmonique, ne ressemblait pas à l'original hier. Ni de près ni de loin... Jusqu'à ce que Nanette s'en mêle: «Faudrait juste être sûr de qui chante quoi... On le refait, O.K.?»

Nanette a fait des dizaines de spectacles-hommages, mais celui-ci est spécial pour la Québécoise du Mississippi. «D'abord, c'était Gerry, avec qui j'ai beaucoup aimé travailler: il aimait les choses bien faites. Et puis ici, on chante du rock et du blues: that's my house, baby!»

Bobby Bazini, lui, n'a jamais travaillé avec Gerry ni, probablement, avec aucun de ses collègues de ce soir. «Je ne connaissais pas la musique d'Offenbach ou de Gerry Boulet: chez nous, à Mont-Laurier, on écoutait du country.

«Qu'est-ce que tu vas chanter demain?

- Je suis content: ils m'ont demandé de chanter la chanson favorite de Gerry...»

D'autres bras l'ont enlacé, d'autres yeux lui ont souri, mais, ce soir, la route nous ramène à lui: jamais dans les coeurs Gerry n'aura été si vivant.