Ils ont fait un album de rock enfumé, avec des riffs salaces et ensorcelants, à mi-chemin entre du Jimi Hendrix et les ballades de Sonic Youth. En faisant de la musique, mais aussi dans leur vie de tous les jours, les trois acolytes de The Last Assassins tripent... Vendredi dernier, ils étaient sur le Bloody Caesar et le vin rouge à 11h du matin, dans un esprit presque contagieux.

Jean Leloup le répétera souvent en entrevue: il déteste tout ce qui est «formaté», que ce soit dans l'art ou dans la vie de couple. «L'irrationnel, quand il est dirigé, je trouve ça épouvantable!»

«La musique, c'est spirituel. Je ne vois pas ça comme un objectif, mais comme une façon de faire, dit Leloup. Un humain, ce n'est pas fait pour être en sécurité, mais pour aller chasser.»

Jean Leloup, Mathieu Leclerc et Virginia Tangvald n'avaient pas prévu faire de disque. Mais en parallèle avec le film de Leloup, Karaoké Dream, présenté cet été au festival Fantasia, ils ont commencé à jouer de la musique ensemble dans le studio-maison du chanteur et cinéaste.

«Je joue tout le temps de la guitare la nuit. Je fais beaucoup de musique sans texte, et j'ai demandé des textes à Virginia, qui avait fait des back vocals sur mon album Mille Excuses Milady», explique Leloup.

Mathieu Leclerc, ami de longue date et d'abus de toutes sortes, a prêté sa poésie comme il l'avait fait pour La Vallée des réputations aux textes des chansons de The Last Assassins, qui sont tous en anglais sur l'album. «On a coupé les chansons en français, mais je vais les mettre sur mon nouveau disque à moi, souligne Leloup. J'ai deux cultures musicales: celle des chansons de Georges Moustaki et Dutronc, et les riffs d'Hendrix et Led Zep... mais mettre du franco là-dessus, c'est un peu rapporté (...) Mathieu et Virginia, ils composent naturellement en anglais.»

The Last Assassins a enregistré son matériel dans le studio de Pierre-Carl Daoust. Avec une facture feutrée et très lo-fi, l'ensemble séduit l'oreille. «Pierre-Carl habite à côté de chez nous. C'est une affaire de voisins qui s'appellent et qui se disent: viens t'en, raconte Jean Leloup. Puis ça s'est mis à marcher et on a vu qu'on avait peut-être un disque.»

«Jean est l'être disfonctionnel le plus fonctionnel en ville», dit Mathieu Leclerc. «Même si tu ne vois pas où il s'en va, tout finit par se mettre en place et marcher, ajoute Virginia Tangvald. Tout le monde dit qu'il est excentrique, mais il a juste une quête d'authenticité et une rage de vivre.»

Ainsi est né un vrai premier disque de The Last Assassins, même si ce n'était à la base que de longs jams entre amis. Il est produit par Leloup et ses Productions Roi ponpon, et distribué par Dare to Care Records. «La musique, pour qu'elle soit bonne, il ne faut pas que ce soit à cause de papa», dit Jean Leloup, qui plaint les gens qui sont pris dans une vie de 9 à 5, parce qu'ils ne «s'organisent pas» des projets. «Je refuse d'être dépossédé de la possibilité d'être dans la marde ou de ne pas être dans la marde», plaide-t-il.

Jeudi dernier, The Last Assassins se produisait à MusiquePlus. Dix minutes avant d'entrer en ondes, Mathieu, Virginia et Jean ne savaient pas quelle forme allait prendre leur prestation. «Il n'y a pas de formule», dit Virginia, fille d'une mère belge qui a grandi Toronto, et qui est née dans les Antilles sur le bateau de ses deux parents marins.

Pour la tournée baptisée Electric Voodoo Night et le spectacle au théâtre Rialto, le 23 septembre, dans le cadre de Pop Montréal, Jean Leloup interprétera des chansons avec ses complices de The Last Assassins, mais il revisitera aussi ses plus grands succès.

C'est du moins ce qui est annoncé. D'ici là, il peut très bien changer d'idée. «Je déteste tout ce qui est formaté», vous dira-t-il.