Yves Léveillé est un coloriste du jazz québécois, créateur dont la progression est lente est sûre. D'aucuns ont reconnu le meilleur de ce musicien à l'écoute de son sixième et dernier album, Chorégraphie, lancé en 2010 sous étiquette Effendi. En voici la relecture sur scène, ce vendredi au Gesù.

«Depuis deux ans et demi, explique-t-il, je joue avec ce quartette composé de Roberto Murray, saxos alto, baryton et soprano, Adrian Vedady, contrebasse et Alain Bastien, batterie. Aux saxes ténor et soprano, Yannick Rieu sera notre invité pour l'occasion. Nous n'avions jamais eu l'occasion de jouer ensemble, il a répété avec nous afin de s'imprégner de ma musique. Ça promet!»

Pianiste, compositeur, improvisateur, leader, Yves Léveillé est une force tranquille. Calme, pacifique, placide, néanmoins déterminé. À l'image de sa musique. Mine de rien, ce musicien a fait son chemin dans cette petite jungle du jazz québécois.

Natif de Lévis, il s'est inscrit à l'université Laval, étudié la composition auprès de François Morel.

«Je me suis mis progressivement au piano jazz pour jouer avec des copains, j'ai aussi fait de la contrebasse. Il y avait beaucoup de jazz à Québec, c'était dans l'air;  Maurice Bouchard, Raynald Drouin, les frères Côté...», relate-t-il.

Pendant ces années passées à Québec, Yves Léveillé est devenu professionnel, fait les 5 à 7 de l'hôtel Clarendon, complété un premier cycle universitaire en composition pour ensuite « venir dans la grande ville» . Jeune adulte à la fin des années 70 début 80, Yves Léveillé a précisé son esthétique musicale à l'écoute des courants forts de ce cette époque. Il ne s'en cache pas et revendique les sources de son approche actuelle: «J'ai toujours apprécié par les musiques chambristes, l'étiquette ECM, le jazz européen, les musiques impressionnistes et contemporaines de tradition classique.»

Depuis lors, carrière montréalaise. Carrière discrète mais bien réelle. Direction d'orchestre, composition, et six albums derrière la cravate, tous sur Effendi, dont le tout premier de l'étiquette montréalaise que possède le contrebassiste et compositeur Alain Bédard, originaire de Québec comme lui.

Yves Léveillé ne se prend pas pour cet autre qu'il n'est pas: il sait que son jeu pianistique est d'abord au service de son écriture, que ce jeu tient plus de l'accompagnement et que la musique l'emporte largement sur les prouesses techniques. Ce qui n'empêche en rien l'élévation progressive du coefficient de difficulté: «J'essaie quand même de pousser mon affaire au piano mais j'ai toujours privilégié la composition. Certains de mes nouveaux projets, il faut dire, me mènent plus au devant.»

Avec le temps, l'écriture se raffine et s'émonde, signes évidents de maturité :

«Dans mes premiers albums, je mettais plus d'arrangements.  Avec le temps, j'ai épuré. Bien sûr, il y a pas mal d'écriture dans  mon dernier album, mais plus d'espace pour l'expression. J'ose croire avoir trouvé une manière de faire la synthèse de mon écriture orchestrale, ce qui donne un concept plus ouvert. J'aime encore fouiller mes harmonies et mes arrangements, mais il faut que le tout soit à la fois maîtrisé et souple.»

L'ensemble d'Yves Léveillé se produit au Gesù ce vendredi, 20h.