Elle était citée au Gala des Grammy dans la prestigieuse catégorie du meilleur nouvel artiste, mais c’est plutôt le prix de la meilleure performance musicale mondiale qu’elle a remporté. Entrevue avec l’artiste de Brooklyn d’origine pakistanaise Arooj Aftab, qui donnera son premier spectacle à Montréal dans le cadre du Festival de jazz.

« Je suis à Londres, indique Arooj Aftab. J’ai un spectacle demain à Glastonbury. Je suis excitée. »

Il y de quoi ! Pour un artiste, c’est un fait d’armes de prendre part au mythique festival de musique extérieur de Glastonbury. En fait, Arooj Aftab multiplie les succès depuis la sortie de son troisième album, Prince Vulture, en avril 2021. Elle a été la première artiste pakistanaise à gagner un trophée Grammy, soit celui de la meilleure performance de musique du monde pour sa magnifique chanson Mohabbat. Elle était aussi en lice dans la catégorie du meilleur nouvel artiste aux côtés d’Arlo Parks, Olivia Rodrigo, Baby Keem ou encore FINNEAS.

À l’occasion de la fin du ramadan, Arooj Aftab a aussi été invitée à la Maison-Blanche pour réciter devant le président Joe Biden The Promise, un texte du grand poète perse du XIIIsiècle Rumi.

N’est-ce pas tout un exploit ? « On veut tous avoir la reconnaissance que l’on croit mériter, nous dit Arooj Aftab, qui a un humour pince-sans-rire. On pense que le monde va nous laisser tomber, mais parfois, les choses marchent ! », lance l’artiste de 37 ans de sa très belle voix.

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Un parcours nomade

Arooj Aftab, fille de diplomates pakistanais, est née en Arabie saoudite, puis elle a vécu son adolescence à Lahore. « J’ai toujours été intéressée par la musique et entourée de musique, et j’ai appris à jouer de la guitare par moi-même », raconte celle qui a ressenti plus tard le besoin d’aller étudier à Boston au prestigieux Berklee College of Music.

Je voulais vraiment apprendre les théories du jazz et acquérir les outils qui allaient me permettre d’enregistrer la musique que j’avais envie de faire.

Arooj Aftab

Plusieurs articles au sujet Arooj Aftab soulignent qu’elle se réapproprie le vieux courant poétique persan ghazal, mais elle tient à remettre les pendules à l’heure. « Je n’ai jamais étudié la musique classique pakistanaise. […] Je comprends que les gens m’associent au ghazal à cause de l’endroit d’où je viens, mais ma musique est personnelle et n’a rien à y voir. »

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Une voix poignante

Si son troisième opus, Vulture Prince, a récolté des critiques élogieuses et s’est hissé dans les palmarès de fin d’année en 2021, c’est parce que tout s’arrête autour de nous quand Arooj Aftab chante en urdu – sa langue maternelle – sur les cordes d’une harpe, d’un violon ou d’une guitare classique. Nous sommes quelque part entre le folk et le jazz minimaliste, et même pas loin du reggae sur la seule pièce en anglais, Last Night.

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Écrit pendant qu’elle vivait le deuil de son frère, Vulture Prince est pour son autrice une sorte d’avatar androgyne et « un mélange de plusieurs symboles ».

Arooj Aftab voulait exposer le fait que ce que nous perdons dans la vie s’inscrit dans notre mémoire et nous suit…

Il y a l’idée de la mort et de la renaissance. C’est sombre, mais c’est la continuation de la vie.

Arooj Aftab

Arooj Aftab chante la pièce Diya Hai en duo avec la chanteuse et guitariste virtuose brésilienne Badi Assad. « C’est une légende. J’étais une de ses fans depuis longtemps et de collaborer avec elle était un rêve qui devient réalité. […] Mon Dieu qu’elle joue tellement admirablement. Il y a une profondeur et un si haut calibre dans son jeu… C’est l’une des meilleures guitaristes au monde. Elle élève vraiment la chanson. »

Quant à la sublime chanson Mohabbat, son titre fait référence au thème le plus universel – et inépuisable – dans la musique pop de l’amour. « C’est à propos d’aimer quelqu’un avec qui c’est impossible de se trouver. Tu sais, the usual ! », lance Arooj Aftab.

En étant invitée dans des festivals comme Coachella et Glastonbury, Arooj Aftab participe à l’ouverture des frontières de la pop dans d’autres langues que dans celle qui est la plus parlée dans le monde.

« La langue n’est plus si importante, car le langage de la musique est si fort », dit-elle si bien.

Arooj Aftab se produira au Club Soda le 5 juillet et au Festival d’été de Québec le 7 juillet.

Consultez le site du Festival de jazz Consultez le site du Festival d’été de Québec