(Paris) « Je voulais une pochette lumineuse, un néon dans ces temps sombres et compliqués » : les critères choisis par Stephan Eicher pour ses visuels collent aussi aux chansons de son nouvel album, Ode.

Le disque, 17e album studio, « raconte une histoire », comme le dit l’artiste rencontré à Paris par l’AFP. Ode s’ouvre par Sans contact, inspiré par les premiers mois de la crise sanitaire, et s’achève par Éclaircie, mot qui semble avoir guidé l’ensemble.

La pochette, qui joue sur une couleur rouge pétante, est signée de l’artiste contemporaine suisse Sylvie Fleury. « Depuis Homeless Songs, je demande à des artistes contemporains de formuler la pochette, car la musique a toujours nourri l’inspiration de ces artistes », déroule l’auteur-compositeur-interprète suisse.

Il avait aussi récemment travaillé avec la plasticienne française Sophie Calle. « C’est une façon pour moi de recevoir des pièces d’art contemporain et de les exposer, sans avoir à débourser une fortune ».

Ode rassemble des chansons inédites et d’autres déjà directement parues cette année sur les plateformes, par poignées, loin du format album en physique attendu pour un artiste de son rang.

PHOTO TIRÉE DU SITE DE STEPHAN EICHER

La pochette d’Ode, qui joue sur une couleur rouge pétante, est signée de l’artiste contemporaine suisse Sylvie Fleury.

Qu’a-t-il tiré de cette expérience de livraison numérique ? « Je pensais que le public serait heureux de recevoir de la musique comme ça, sans attendre l’album. C’était une mauvaise idée, un échec total, du Stephan Eicher quoi. On ne va pas faire des choses qui fonctionnent », lâche-t-il dans son rire doux-amer communicatif.

Tout n’est pas si noir. En 2022, il y a encore une attente autour de l’auteur du succès Déjeuner en paix. En tout cas autour du format album, puisque Ode s’est classé à la 8e place des meilleures ventes en France pour sa première semaine d’exploitation, selon les chiffres du Snep (Syndicat national de l’édition phonographique).

« Il faudra de la magie »

C’est d’ailleurs le seul disque de chansons dans un top dix dominé par rap, r’n’b ou pop moderne (d’OrelSan, numéro 1, à Angèle, numéro 10).

Stephan Eicher se tourne maintenant vers la transposition scénique pour une prochaine tournée qui intégrera des morceaux d’Ode, dont nombre de textes sont une fois encore signés de Philippe Djian, écrivain français et complice de longue date.

Pour la scène, le chanteur suisse de 62 ans à la moustache façon d’Artagnan fourmille d’idées, lui qui s’était autrefois produit avec des musiciens-automates.

Dernièrement, il tournait avec ses musiciens (en chair et en os cette fois) sur une scène en forme de radeau (avec coque en tonneaux, cordages et voiles). Un décor symbole de la résilience des artistes, parfois malmenés par l’Orage (un des nouveaux titres), mais embarquant toujours les spectateurs vers les rivages de Rêverie (autre morceau d’Ode).

Pour les prochains concerts, « il faudra de la magie », lâche-t-il. « On nous dit en ce moment qu’il faut s’attendre au pire, avec des coupures électriques. Je veux simuler ça sur scène, avec la sono qui baisse, mais avec une trompette-automate qui jouerait toute seule et flotterait dans le public avant que les basses ne reprennent », s’emballe le musicien.

« Bon, un tiers de mes idées seulement va être réalisable, comme d’habitude, et vous allez dire que je baratine en venant voir le spectacle », s’esclaffe-t-il. On lui avait dit aussi que sa tournée avec sa scène-radeau itinérante serait impossible. Elle a pourtant bien eu lieu.