Avant d’assister comme des milliers de personnes au concert gratuit de l’Orchestre symphonique de Montréal, notre journaliste a pu s’entretenir avec le chef Rafael Payare à l’occasion du coup d’envoi de la Virée classique.

« Le miracle de la musique quand ça fait boum ! », évoquait le chef d’orchestre Rafael Payare avant le concert gratuit de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) sur l’Esplanade du Parc olympique.

La puissance d’un air ne pouvait être plus viscérale et bouillante que lors du rappel, alors que les 77 musiciens et leur maestro ont surpris le public avec la Chevauchée des Walkyries de Wagner, rendue célèbre notamment par le film Apocalypse Now.

Ce fut grandiose, et cela a fait boum !

  • Une magnifique soirée montréalaise et du beau temps qui n’était pourtant pas prévu par les météorologues

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Une magnifique soirée montréalaise et du beau temps qui n’était pourtant pas prévu par les météorologues

  • Rafael Payare dirige l’OSM.

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    Rafael Payare dirige l’OSM.

  • Nathalie Maillé, directrice générale du Conseil des arts de Montréal, Magalie Lépine-Blondeau, porte-parole de la Virée classique, et Valérie Plante, mairesse de Montréal, flanquent le chef Rafael Payare.

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    Nathalie Maillé, directrice générale du Conseil des arts de Montréal, Magalie Lépine-Blondeau, porte-parole de la Virée classique, et Valérie Plante, mairesse de Montréal, flanquent le chef Rafael Payare.

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Les milliers de spectateurs étaient déjà séduits par le programme du coup d’envoi de la Virée classique qui réunissait, pour reprendre les mots de sa porte-parole, Magalie Lépine-Blondeau, des « airs qui font partie de nos vies », mais dont tous ne connaissent pas nécessairement les titres et les compositeurs.

La mezzo-soprano Isabel Leonard – vedette du Metropolitan Opera – a notamment prêté sa voix à un extrait du célèbre opéra de Rossini Le barbier de Séville. Pour sa part, la violoniste sud-coréenne Bomsori a interprété Carmen Fantasie de Waxman, d’après Bizet. Les deux solistes invitées ont brillé par leur prestance et leur élégance.

Le public a aussi pu savourer les Tableaux d’une exposition de Modeste Moussorgski. Un choix musical plus audacieux pour un concert en plein air, par ses airs en retenue sinueux, mais quelle finale épique portée par les gestes fougueux de Rafael Payare, qui avait troqué ses jeans et ses espadrilles rouges portés en répétition pour un smoking noir et blanc ! Les écrans géants permettaient de voir, au-delà de sa chevelure vagabonde, son regard et ses gestes si épris de sa partition.

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Rafael Payare et son chauffeur Marcel

Entrevue en voiture avant le spectacle

Habituellement, lors de ses déplacements officiels, Rafael Payare prend place à côté de son chauffeur Marcel. Mais pour les besoins de notre entrevue menée sur le chemin de la Maison symphonique à l’Esplanade du Parc olympique, il a cédé son siège passager au photographe de La Presse.

L’OSM au Parc olympique après Metallica ? « Ça marche », a lancé Rafael Payare, avant de rappeler l’existence de l’album S & M (Symphony and Metallica), enregistré en 1999 avec l’Orchestre symphonique de San Francisco.

Il s’agissait du troisième concert de Rafael Payare sur l’Esplanade du Parc olympique – là où ont eu lieu les spectacles de Fierté Montréal –, de son deuxième à titre de directeur musical de l’OSM, mais de son premier en tant que Montréalais d’adoption, du moins depuis plus d’un an.

« Un rêve », dit-il pour décrire sa nouvelle vie à Montréal et sa première année en poste pour la 88saison de l’OSM.

« Ma fille va commencer l’école la semaine prochaine », souligne-t-il en parlant d’Ariadna, son aînée, alors que sa plus jeune, Elina, n’a que 18 mois.

« Nous avons vécu la tempête de pluis verglaçante, la panne électrique…, blague-t-il. Mais aussi le beau temps et la saison estivale qui est fantastique. »

« On se sent chez nous, vraiment », poursuit plus sérieusement celui qui est en couple avec la violoncelliste américaine de renom Alisa Weilerstein, en vedette ce jeudi soir dans un concert présenté au festival Ravinia, à Chicago.

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« L’OSM au pied du Stade, c’est l’OSM au pied d’un emblème de Montréal. C’est du grandiose au pied du grandiose », a dit à La Presse la porte-parole de la Virée classique, Magalie Lépine-Blondeau.

Un chef d’orchestre accessible

Le neuvième directeur musical de l’histoire de l’OSM n’aime pas se faire appeler maestro. Il préfère Rafael, ce qui le rend certainement moins intimidant à interviewer qu’un Kent Nagano ou un Charles Dutoit.

« Rafael, ça marche », nous dit-il avec humilité.

Chose certaine, les gens sentent qu’il est un chef accessible. L’an dernier, Rafael Payare et l’équipe de l’OSM avaient même sous-estimé le nombre de spectateurs d’origine latine qui viendraient à sa rencontre à l’occasion du concert sur l’Esplanade du Parc olympique, si bien qu’on avait prévu du temps mercredi pour un bain de foule avant le concert.

  • Rafael Payare a signé le chapeau de cette petite fille dont la famille mexicaine vient de s’installer à Montréal pour deux ans.

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    Rafael Payare a signé le chapeau de cette petite fille dont la famille mexicaine vient de s’installer à Montréal pour deux ans.

  • Rafael Payare avec des spectateurs d’origine vénézuélienne, comme lui

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    Rafael Payare avec des spectateurs d’origine vénézuélienne, comme lui

  • Rafael Payare discute avec un caméraman qui l’a vu au Festival de Lanaudière.

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    Rafael Payare discute avec un caméraman qui l’a vu au Festival de Lanaudière.

  • Rafael Payare a salué les gens arrivés tôt pour le concert en fin d’après-midi.

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    Rafael Payare a salué les gens arrivés tôt pour le concert en fin d’après-midi.

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Rafael Payare a autographié les chapeaux de Maya et de Natalia, les filles de Geovanna Garcia Camacho et de son mari Jorge De la Torre. La famille a quitté le Mexique pour s’installer à Montréal… il y a 15 jours ! C’était déjà leur deuxième visite au Parc olympique puisque le quatuor était aussi au spectacle de Metallica.

C’est grâce à l’entrevue accordée par Rafael Payare au site web Latinos en Montréal que la famille a appris la tenue du concert. « Les filles jouent de la musique. Il fallait être là », dit Geovanna, qui est déjà amoureuse de Montréal. « Une ville magique », dit-elle.

Pour sa part, Adelina Rodriguez avait apporté un drapeau du Venezuela. Elle est arrivée avec sa fille Avelina à 16 h – après une visite au Jardin botanique – pour être aux premières loges devant la scène et dans l’espoir de rencontrer Rafael Payare. « Ça me fait chaud au cœur. Je suis tellement fier de lui et de la façon dont il nous représente », a dit Adelina, qui a pu échanger quelques mots et se faire photographier avec son compatriote.

26 concerts en salle et 100 activités gratuites

Mercredi marquait le début d’un marathon pour Rafael Payare puisqu’il dirigera neuf concerts jusqu’à dimanche pendant la Virée classique. « Une semaine folle mais merveilleuse », dit-il en riant.

Samedi, il sera aux commandes de la première des deux représentations complètes de Carmina Burana à la Maison symphonique, et il sera du concert gratuit présenté au Complexe Desjardins avec un orchestre composé de musiciens amateurs.

C’est sans compter qu’il accueillera – à nouveau – le jeune Ensemble Obiora, composé de musiciens issus de la diversité, au son de la Petite musique de nuit de Mozart. Dans le même programme prévu à 16 h 15, le violoniste solo de l’OSM Andrew Wan partagera le devant de la scène avec Tanya Charles Iveniuk pour la Symphonie concertante du chevalier de Saint-Georges, un compositeur surnommé le « Mozart noir » – né esclave en Guadeloupe et adoré par la reine Marie-Antoinette. « Un violoniste et un compositeur incroyable, souligne Rafael Payare. Et un grand escrimeur. »

Jusqu’à dimanche, c’est 26 concerts en salle et 100 activités gratuites qui sont offertes au public. « L’exposition à la musique classique est importante », souligne Rafael Payare, dont le parcours incarne le mandat de la Virée classique axé sur la découverte et l’accessibilité.

Comme disait le maître à penser du chef d’orchestre de l’OSM, José Antonio Abreu, « la musique est un droit, pas un privilège ».

José Antonio Abreu a créé El Sistema, le célèbre programme musical vénézuélien duquel a émergé Rafael Payare, qui y a appris le cor puis a succombé à la puissante émotion que l’on ressent en faisant partie d’un orchestre. « Le sentiment que c’est plus grand que soi. »

C’est plus tard que Rafael Payare a été subjugué par le pouvoir de celui qui tient la baguette, en voyant à l’œuvre Giuseppe Sinopoli. « Il venait d’Italie et ne parlait pas espagnol, mais son énergie pouvait changer le son de l’orchestre », raconte-t-il.

Une question d’énergie

Une énergie unique anime aussi Rafael Payare. Sachez que lui et l’autre chef d’orchestre chouchou de Montréal, Yannick Nézet-Séguin, s’écrivent régulièrement des messages textes. Ils se sont rencontrés pour la première fois à New York, au Carnegie Hall, en 2021. « C’est comme si on se connaissait depuis longtemps. »

Les deux chefs décontractent le décorum de la musique classique tout en excellant dans leur prestigieux poste de chef d’orchestre respectif.

La nervosité n’est d’ailleurs pas quelque chose qui habite Rafael Payare. « Je peux avoir faim et chaud, mais être nerveux ? Non », dit celui qui a constamment une partition en tête, et qui aime quand ça fait… boum !

Consultez la programmation de la Virée classique