Les Violons du Roy ont ouvert leur nouvelle saison jeudi après-midi au Palais Montcalm avec La Seine en fête, une sérénade pour voix et orchestre de Vivaldi peu connue. Un concert digne d’intérêt avec des solistes d’un intérêt variable.

L’organisation avait commencé son automne 2022 par un concert-prestige mettant en vedette la contralto jeannoise Marie-Nicole Lemieux et le contreténor français Philippe Jaroussky. En 2021, c’était la grande soprano française Sandrine Piau qui avait ouvert le bal. Contraste, donc, avec le présent millésime, où trois chanteurs peu connus de la jeune génération faisaient leurs débuts aux Violons du Roy dans une œuvre de niche dont les enregistrements intégraux se comptent sur les doigts d’une main.

Prévu au départ en juin 2020 avec la soprano Ana Quintans, la mezzo-soprano Anna Reinhold et la basse Ashley Riches, l’évènement avait été reporté à cause de la pandémie. Seule la deuxième soliste, originaire de Paris, est restée à l’affiche, alors que les autres ont été remplacés par la Philadelphienne Robin Johannsen et le Californien Alex Rosen.

Les Violons du Roy avaient pour leur part presque doublé de taille, avec un quatuor de flûtes (deux à bec et deux traversières), deux hautbois, un basson et une guitare s’ajoutant au noyau habituel.

Composée vers 1725, vraisemblablement à la suite d’une commande de Jacques-Vincent Languet, ambassadeur de France à Venise, afin de célébrer le roi Louis XV, la sérénade (œuvre vocale allégorique jouée dehors le soir pour célébrer tel personnage) était vraisemblablement exécutée pour la première fois au Québec.

Les trois solistes, personnifiant qui l’Âge d’or (soprano), qui la Vertu (mezzo-soprano), qui la Seine (basse), chantent un total de 11 airs, 3 duos et 3 chœurs, sans compter les sinfonias qui ouvrent chacune des deux parties.

À géométrie variable

L’intérêt de la partition, qui dure environ 80 minutes, est variable. À côté des magnifiques airs « Al mio seno il pargoletto » (L’Âge d’or) et « Pieta, dolcezza, fanno il suo volto » (La Seine) et de l’amusant duo « Qui per darci amabil pace » (les deux femmes), de nombreux numéros paraissent considérablement plus stéréotypés. C’est sans parler du texte, de pure convention.

Les interprètes servent cette œuvre inégale de manière… inégale. Le meilleur est sans aucun doute Alex Rosen, une voix impressionnante, bien timbrée, qui n’est pas sans faire penser à celle de son collègue Matthew Brook, un habitué des Violons du Roy. Il est particulièrement émouvant dans « Pieta, dolcezza », juste assez pianissimo dans le retour de la partie A.

PHOTO ROBIN JOHANNSEN, GRACIEUSETÉ DE L’ARTISTE

Robin Johannsen

Robin Johannsen, proche collaboratrice du chef René Jacobs, fait montre d’autant de présence et de raffinement, mais avec une voix qui manque souvent de rondeur.

Quant à Anna Reinhold, qui chantait dans l’Orfeo de Monteverdi dirigé par Leonardo García Alarcón cet été au Festival de Lanaudière, elle est irréprochable sur le plan vocal, mais pâtit d’un engagement scénique minimal. La mezzo-soprano mord peu dans les mots et ne semble pas très émue par ce qu’elle chante.

L’orchestre et son chef font de leur côté un sans-faute. Dirigeant du clavecin, Jonathan Cohen donne beaucoup de relief à la partie orchestrale, avec des tempos qui semblent toujours justes. Les flûtes à bec et la guitare de Sylvain Bergeron ajoutent de subtils coloris à l’ensemble.

Le concert est repris à la Maison symphonique de Montréal dimanche, à 14 h.

Consultez la page du concert à la Maison symphonique