Orchestrations d’une grandeur intimiste et chansons en quête du divin, Sufjan Stevens fait la somme de ce qu’il est sur Javelin.

Sufjan Stevens a révélé sur Instagram être atteint du syndrome de Guillain-Barré au milieu du mois de septembre. Cloué au lit pendant quelques semaines, il amorçait alors une réadaptation qui s’annonce longue puisqu’il doit réapprendre à marcher. On ne s’attend pas à le revoir en concert avant longtemps. Il avait toutefois déjà bouclé son dernier disque, Javelin, qui paraît malgré la maladie qui s’abat sur cet artiste chouchou des amateurs d’indie folk orchestral.

Sur ce dixième album, le songwriter américain fait ce qu’on a envie d’appeler un retour aux sources. Délaissant ses explorations électros de la dernière décennie, il mise sur une riche instrumentation acoustique, mêlant guitares, flûtes, percussions, piano et bien d’autres choses encore. Des voix humaines aussi, puisque des chœurs enjolivent en effet le dernier tiers de la plupart des chansons, accentuant leur caractère spirituel.

Sufjan Stevens ne surprendra pas ceux qui ont craqué il y a près de 20 ans pour Ilinoise et le portent aux nues depuis : ils y retrouveront sa voix douce, son vague à l’âme et sa manière raffinée. Les touristes de son œuvre – j’en suis – se laisseront sans doute impressionner par sa générosité mélodique, par ses superbes juxtapositions de timbres et de couleurs, par sa manière bien personnelle de mêler sentiment amoureux et quête spirituelle aussi.

Toutefois, ils seront peut-être moins indulgents que les mordus de longue date devant ses structures répétitives : presque toutes les chansons de Javelin sont conçues sur le même modèle – avec un pont musical plus rythmé vers la fin –, comme si elles découlaient d’une seule idée. Ce qui devient lassant, malgré les autres prouesses. Exception : la grandiose Shit Talk, qui s’étend sur plus de 8 minutes et où l’artiste transcende tout ce qu’il fait ailleurs sur ce disque.

Sufjan Stevens demeure un architecte hors du commun, dont la musicalité surpasse celle d’une majorité d’artistes de tous genres. Son folk symphonique d’appartement risque néanmoins de laisser un peu froids ceux qui ne sont pas facilement touchés par les créateurs qui visent à atteindre le sacré.

Extrait de Shit Talk

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Javelin

Folk orchestral

Javelin

Sufjan Stevens

Asthmatic Kitty

7/10