Peter Gabriel propose un nouvel album en phase avec notre époque et démontre que la qualité est plus importante que la quantité.

Peter Gabriel n’est pas un homme pressé. Vingt et un ans ont passé depuis son dernier album de chansons originales, Up. Mais l’ancien leader de Genesis a toujours préféré la profondeur à la productivité, et cela s’entend sur son nouvel album, I/O, paru il y a quelques jours.

On dit « nouveau », quoiqu’en réalité, les 12 morceaux de I/O ont tous été lancés individuellement pendant la dernière année, à raison d’une nouvelle chanson à chaque pleine lune. Les fans y avaient donc déjà goûté. Mais c’est une autre expérience d’entendre ce matériel réuni, dans un tout organisé.

À 73 ans, Peter Gabriel n’essaie pas de jouer les jeunes premiers. Il assume parfaitement son âge, mais n’a rien perdu pour autant de son acuité. I/O est un album d’« art rock » qui incite à la réflexion, abordant des thèmes aussi fondamentaux que la technologie, le temps qui passe et notre place dans le monde.

Culture de la surveillance (Panopticom), justice sociale (The Court), interconnexion de l’homme et de la nature (Olive Tree) : les grands thèmes de notre époque sont évoqués avec élégance. Plus personnelles, So Much et And Still se questionnent sur la vieillesse et notre finalité. Malgré une certaine gravité, l’album porte une forme d’optimisme et recèle quelques morceaux plus funky pouvant rappeler le Gabriel des années 1980 (Road to Joy).

Sur le versant critique, on peut regretter des titres un peu bateau (Love can Heal, Live and Let Live) et quelques sons un peu datés, qui nous ramènent directement au début des années 1990, une palette qui s’explique peut-être par la présence des éternels vieux complices, Tony Levin à la basse, Manu Katché à la batterie et David Rhodes à la guitare.

Sur l’autre versant, force est d’admettre que la voix de Gabriel est toujours aussi claire, unique et émouvante. Que cet album a le mérite de prendre son temps. Qu’il est pertinent, profond, nourrissant et d’une qualité constante. À ranger parmi les bons crus de Gabriel, un artiste qui a su bien vieillir, comme ses collègues David Byrne et Brian Eno (ce dernier joue aussi sur l’album).

À noter qu’I/O est offert en trois formats. Un mix « lumineux » réalisé par Mark Stent (Beyonce, Ed Sheeran, Lady Gaga, and Madonna), un mix « sombre » réalisé par Tchad Blake (T Bone Burnett, Los Lobos, Sheryl Crow, Black Keys) et même un mix Dolby Atmos pour les freaks du son du futur.

Extrait de I/O, Bright-Side Mix

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I/O

Rock

I/O

Peter Gabriel

Real World

8/10