Rappeur underground fort respecté depuis déjà plusieurs années, Benny The Butcher poursuit sa quête de reconnaissance plus vaste avec son premier album sur la mythique étiquette Def Jam.

Au début des années 2000, avec la montée en flèche de la popularité du hip-hop, de nombreux « gangsta » rappeurs ont voulu obtenir leur part du gâteau en proposant des rimes plus simples, des refrains accrocheurs – souvent R & B – et des flows faciles. Certains ont mieux réussi que d’autres.

Avec le retour en force du boom bap des années 1990, ce n’était qu’une question de temps avant que les nouvelles vedettes du genre tentent des manœuvres semblables afin d’augmenter adeptes et revenus. Benny The Butcher est possiblement le meilleur exemple de cette mouvance. Au sein du collectif Griselda, le MC de Buffalo a démontré avec constance son talent de conteur, en particulier sur le formidable Tana Talk 3 (2018). Puis, graduellement, sa cadence caractéristique et sa sélection de beats bien lourds se sont diversifiées. Burden of Proof (2020) entièrement produit par Hit-Boy, qui est en partie responsable de la renaissance de Nas, était sa première ligne lancée dans l’océan du succès commercial. Une bonne partie du public a mordu, mais Benny est tout de même revenu à sa recette originale deux ans plus tard sur Tana Talk 4, rythmé par Daringer et The Alchemist.

Everybody Can’t Go coupe la poire en deux, en quelque sorte, alors que Hit-Boy signe 7 des 12 morceaux et qu’Alchemist se charge du reste. Le deuxième extrait, One Foot In – avec l’incomparable Stove God Cooks –, illustre parfaitement l’ironie de sa démarche. Par différents exemples, il souligne qu’il a souvent baigné à fois dans la criminalité de la ville des Bills et dans les hautes sphères du hip-hop américain. Sa conclusion est toutefois que faire les deux est voué à l’échec…

Bien que l’approche du rappeur de 39 ans soit davantage celle d’un artiste aux grandes aspirations, il ouvre sa nouvelle offrande avec Jermanie’s Graduation, l’archétype des récits de la rue qui ont fait de lui l’un de nos préférés. BRON est dans un tout autre registre, mais ne nous convainc pas. Pour reprendre le thème du basket de la pièce, Benny marque beaucoup de points dans une cause perdante. La suivante, Big Dog, fait mieux, surtout grâce à Lil Wayne, mais son refrain est l’un des pires de l’histoire récente. Benny confie avec sagesse quelques refrains à ses invités, qui comptent Snoop Dogg, Armani Caesar et Kyle Banks. Les chansons ne sont pas nécessairement meilleures pour autant.

TMVTL est pour nous le moment fort de l’œuvre de 40 minutes. Les percussions d’Alchemist auraient pu frapper plus fort, mais les exquises transitions sont suffisantes pour lui pardonner. Benny offre quant à lui une autre de ses leçons de la vie de gangster truffées d’images vives. Griselda Express, avec ses cousins Westside Gunn et Conway the Machine, n’atteint pas aussi bien la cible, surtout en raison du beat redondant d’Alchemist. Il faut dire que leurs collaborations passées ont mis la barre très haut.

Extrait de TMVTL, de Benny The Butcher

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Everybody Can’t Go

Rap

Everybody Can’t Go

Benny The Butcher

Def Jam Recordings

6,5/10