Hier, l'Astral avait des airs de club des années 60: c'était la rentrée montréalaise de Nadja, alias Nadja Gagnon, du Saguenay Lac-Saint-Jean, la même Nadja qui a vendu quelque 60 000 exemplaires de son premier album éponyme en 10 mois, rempli de reprises de chansons soul et r'n'b bien connues. C'était retour vers le futur en musique, avec une chanteuse habitée, allumée et qui s'assume.

Tout contribuait à ce retour dans le temps, que ce soit ses costumes et ceux de ses musiciens, le décor, mais aussi le coffre, le registre et la pose de voix de Nadja, son incroyable coiffure (qui laisse toujours perplexe...) ou la mise en scène bon enfant, très sympathique du spectacle: qu'elle sorte une «sacoche» remplie de faux billets pour chanter Money ou qu'elle supplie un de ses musiciens déguisé en facteur pour Please Mr. Postman, Nadja est d'une simplicité et d'un naturel désarmants, étrange amalgame de métier (des années à chanter dans les hôtels et les clubs) et de fraîcheur, de générosité aussi.

Accompagnée par son quintette de musiciens très Booker T. and the MG's sous la direction du pianiste jazz Taurey Butler (également mari de Nadja, qui lui lance des clins d'oeil et des sourires amoureux vraiment «cutes»), la dynamique brunette a donc chanté neuf des 12 chansons de son album (Rescue Me, It's my Party, To Sir With Love...), auxquelles elle a greffé une dizaine d'autres classiques du genre (Superstition, Don't Worry, Be Happy, Respect...) et des pots-pourris qu'elle n'a jamais hésité à interrompre pour les commenter avec pertinence en français.

Une des jolies surprises de la soirée, c'est d'ailleurs lorsqu'elle reprend deux chansons francophones des années 60 et 70: Qu'est-ce que ça peut vous faire à vous? de Jennifer (popularisée au Québec par Nathalie Simard!) et La maison sous les arbres de Bécaud. Dans ces chansons comme dans tout son répertoire «vintage» (pendant lequel elle chante même un brin de rap!), Nadja joue de sa voie, jongle avec les notes, module à plaisir les mélodies, pirouette vocalement. Ça pourrait être de l'esbroufe ou de la virtuosité creuse, mais c'est au contraire fait avec un plaisir physique évident et une voix comme il y en a peu. C'est ce bonheur indéniable, cette absence absolue de prétention qui justifie ce spectacle qui ne réinvente rien, c'est vrai, mais qui fait bien ce qu'il a à faire: de la musique, de la bonne. Avis à ceux qui ne boudent jamais leur plaisir...

Sarah Bourdon

Nadja, pour qui Mario Pelchat a eu un coup de coeur il y a quelques années et est devenu son producteur, en a éprouvé un à son tour pour Sarah Bourdon, qu'elle a invitée à faire sa courte première partie. En quatre chansons, la très jolie voix de Sarah Bourdon et son étonnant aplomb ont maté l'Astral, qui s'est tu pour l'écouter. Ça donnait franchement envie d'entendre son disque, qui sortira en octobre.

_____________________________________________________________________________

Nadja en spectacle au Théâtre de la Ville à Longueuil le 12 septembre, à l'Étoile Dix30 de Brossard le 30, puis en tournée au Québec jusqu'en février. Supplémentaire à l'Astral de Montréal le 3 décembre. Infos: nadja.mu