Le concert de Leonard Cohen filmé au O2 Arena de Londres, le 17 juillet 2008, témoignait de la beauté et de l'émotion de la tournée de retrouvailles de l'artiste d'origine montréalaise. Mais la caméra, le montage, la réalisation faisaient un peu beaucoup amateur. Ce qu'on ne pourra reprocher au nouveau DVD Songs From the Road.

Ed Sanders, le réalisateur de Cohen, estime que cette soirée en début de tournée était tellement réussie qu'elle méritait d'être immortalisée sur le Live in London, même s'il devait se contenter essentiellement des images projetées sur les écrans géants dans l'aréna. Voilà toutefois qu'au moment où s'achève cette mémorable tournée de plus de deux ans paraissent un DVD et un CD live de 12 chansons qui bouclent bellement la boucle.

Cette fois, Sanders a pu choisir parmi les chansons d'une quarantaine de concerts, filmées pour la plupart à l'automne 2008 dans différentes villes par une équipe de pros, en haute définition. Huit d'entre elles n'étaient pas du spectacle de Londres dont quelques classiques de Cohen, admirablement réinventés. Je pense à la magnifique The Partisan et à Famous Blue Raincoat, l'une de ses chansons les plus populaires.

Pourquoi avoir choisi The Partisan chantée à Helsinki plutôt que dans des villes (Paris, Québec même) où le propos et les paroles en français auraient eu une résonance particulière? «Nous avions plusieurs critères de sélection, répond Sanders. Dont la qualité sonore et vidéo, le jeu des musiciens... Comme je le mentionne dans le livret de l'album, je me souviens très bien que ce soir-là, en rentrant à l'hôtel, Leonard et moi étions ébahis par The Partisan, en particulier le jeu de Javier Mas.»

Songs From the Road comprend également deux autres chansons parmi les plus belles de Cohen, Avalanche et Chelsea Hotel. Cette version d'Avalanche est hantée comme elle l'était sur l'album Songs of Love and Hate, la voix et le jeu si particulier du guitariste Cohen prenant toute la place. Quant à Chelsea Hotel, qui raconte une rencontre intime avec Janis Joplin, Cohen a dit à son entourage qu'il avait senti une présence en la chantant ce soir-là au Royal Albert Hall de Londres.

Sanders tenait également à inclure quatre chansons qui étaient au programme du Live in London. La joyeuse Closing Time, qui trouve tout naturellement sa place en fin de spectacle, et trois classiques qu'auraient voulu voir et entendre ceux qui n'ont pas acheté le DVD précédent: Suzanne, Bird on the Wire et Hallelujah. Cette dernière, un moment de grâce de chacun des spectacles, prend ici une tout autre dimension quand Cohen la chante au festival rock californien Coachella. Alors qu'à la plupart des concerts de la tournée, la majorité des fans ont les tempes grises, à Coachella, ce sont des dizaines de milliers de spectateurs beaucoup plus jeunes qui scandent le prénom de Cohen avant son arrivée et qui chantent avec lui, hypnotisés, le refrain de cette chanson qu'ils ont peut-être entendue pour la première fois dans la bouche de Jeff Buckley, Nick Cave ou Rufus Wainwright. Du bonbon!

Cohen est complètement rétabli des maux de dos qui l'ont forcé à reporter des concerts l'hiver dernier. Il chante présentement en France et s'arrêtera en Allemagne, à Moscou, en Océanie et même au Cambodge avant de donner deux derniers concerts à Las Vegas en décembre. Par la suite, il travaillera à un nouvel album de chansons originales qui, si tout va bien, pourrait être lancé l'été prochain. Un disque de chansons écrites avant et pendant la tournée, dont trois qu'il joue déjà en concert.

Le poète, qui fêtera ses 76 ans mardi, a donné pendant plus de deux ans des concerts de trois heures ou plus devant des foules plus nombreuses que jamais auparavant. Peut-on espérer qu'il remette ça dans un avenir rapproché?

«Je ne gagerais pas que non si j'étais toi, répond Sanders. De toute façon, ça ne pourra pas se faire avant l'automne 2011. Parce que pour le moment, le nouvel album est sa priorité.».