Le rockeur Xavier Caféïne cassait la glace de son nouveau spectacle hier soir, dans un Club Soda au parterre bien rempli, quelques semaines seulement après avoir présenté les chansons nouvelles de son deuxième album solo pour Indica, Bushido. Rentrée réussie, malgré les apparences de nervosité.

«À chaque show, je me dis que ça va arrêter, qu'il n'y aura pas personne», confiait Xavier Caféïne à son auditoire, après avoir enfilé La Vie est belle et Vive la mort, en ouverture de son spectacle. Et d'ajouter: «Merci de me prouver le contraire!»

Pour qui suit le rockeur depuis ses débuts, le voir ainsi sur une des belles scènes de la ville, jouer devant un public varié et conquis, est franchement ravissant. Vétéran de la scène rock underground depuis même avant 1997, année de parution de l'album Mal éduqué mon amour du groupe qui portait son nom, Caféïne n'a jamais compromis son travail, offrant coup sur coup des albums percutants lui permettant de gagner de l'expérience (mais pas de l'assurance, ça, il en a toujours eu) et, plus important peut-être, de peaufiner son écriture de chansons.

Après un détour dans la langue de Richler (Poxy, en 2003), Caféïne s'isole et fait à la main ce Gisèle (2006) qui l'a consacré auprès du grand public. Consécration pleinement méritée: travailleur acharné doté d'un goût certain pour le bon rock, il a réussi à faire assez de bruit pour qu'on le remarque. Enfin.

Sur scène, c'est d'abord le charisme de l'auteur, compositeur et interprète qui nous frappe. Un frontman naturel, Caféïne, bien sapé dans son complet noir, cravate rouge au cou. Naturel, mais tout de même un peu coincé en cette soirée de première: on l'a déjà vu plus déchaîné que ça, voilà qu'il nous donnait du self control pendant que ses ouvriers du rock jouait la pédale au tapis derrière lui.

Le concert démarrait sur les chapeaux de roues, le son était rigide et percutant, les musiciens d'une exemplaire solidité ­ il y avait notamment Vincent Peake (Groovy Aardvark) à la basse, et son comparse de guitariste Alex Crow. Xavier Caféïne déballait dans l'ordre les trois premiers titres de cet excellent Bushido qu'il venait de nous offrir et que, de toute évidence, le public n'avait pas encore complètement assimilé. Trois des plus solides chansons de ce nouvel opus, quand même, ça démarre bien une soirée.

La tension n'aurait pas dû baisser de la première chanson jusqu'au rappel, or les interventions, entre les chansons, brisaient le rythme.

C'était généralement poli et court, et ça se résumait à introduire la prochaine chanson en donnant son titre. Pas très rock'n roll, tout ça, surtout que le bonhomme a de ces chansons qui se passent d'introduction: Pekin Love et 1-2-3-4, de l'album Gisèle, offertes en milieu de spectacle, étaient sur toutes les lèvres. Idem pour les Gisèle et Le feu, lancées plus tard, et La Fin du monde au rappel, de petites bombes rock balancées avec l'énergie requise. Fameux.

Xavier Caféïne est arrivé à point nommé dans un paysage rock québécois en panne d'artistes rassembleurs. Hormis Éric Lapointe, le rock d'ici est devenu depuis quelques années l'affaire des groupes qui, heureusement, ont aussi fini par rejoindre leur auditoire. Xavier Caféïne incarne le rock d'ici depuis plus de dix ans, et c'est en toute justice qu'il puisse aussi l'incarner pour un plus vaste public. Lorsqu'il aura encore quelques autres concerts derrière la cravate rouge, on pourra dire que ce sera un performeur à ne pas manquer.