Malajube avait la pêche en cette fin d'année, comme quoi certains savent arriver à Noël sans nécessairement avoir la langue à terre, même s'ils ont aussi connu une année 2009 chargée. Constat: un album, Labyrinthes, un mini-album, Contrôle, et une tournée plus tard, le quartet rock était dans une forme resplendissante devant ses fans enthousiastes, offrant sans doute l'une de ses meilleures performances de l'année.

Pour tout dire, le groupe a commencé si fort qu'on se demandait s'il saurait garder le rythme. Arrivé sur scène avant 22h, après la performance du groupe rock instrumental Bateau Noir (on l'a manquée, désolé) et de Clues, la révélation indie rock anglo-montréalaise de l'année (nous y reviendrons), le groupe a mis son poing sur la scène en balançant d'abord Les Collemboles et Casablanca du récent Labyrinthes, puis Casse-cou, du Trompe-l'oeil d'il y a trois ans.

Ça torchait, il n'y a pas d'autre mot. Soudé solide, Malajube déchirait ses compositions avec l'intention de nous en mettre plein les oreilles, de faire en sorte que ces chansons résonnent encore longtemps puisque le groupe s'apprête à prendre une longue pause avant de remonter sur scène. À Casse-cou, certains fans particulièrement excités commençaient déjà le bal du crowd-surfing au parterre, c'est vous dire combien on était content de les revoir une dernière fois.

Malajube a fait un survol de ses trois derniers albums au cours de cette soirée parfaite, enchaînant avec Ursuline, 333 et surtout l'épique Fille à plumes, chaudement accueillie par le public. A suivi Étienne d'août, version live pas mal moins assommante que sur disque, avec l'efficace Francis Mineau à la batterie, qui donnait le ton par un rythme plus enlevé et swinguant que sur la version enregistrée.

Du grand Malajube, à faire mentir les détracteurs. La réputation du chanteur et guitariste Julien Mineau semblait faite: un type renfermé, caché derrière le capuchon de son coton ouaté, les yeux dissimulés sous une tuque, à marmonner des textes étouffés sous le poids de sa guitare. Que nenni! Le Julien nouveau, simplement vêtu d'un t-shirt gris, agissait expressément, chantait clairement dans le micro, alors que la foule entonnait avec lui les paroles des chansons. Ouste, le Malajube cryptique et incompréhensible!

Or, forcément, après une première portion aussi explosive, les Luna, Dragon de glace et même Pâte filo paraissaient plus dociles. Malajube a néanmoins exécuté ses succès avec brio - oh! que ce groupe s'est ressoudé depuis les premiers spectacles de Labyrinthes! -, rassasiant les fans d'un de ses meilleurs concerts avant de s'accorder un moment de créativité en vue d'un album à venir, au mieux l'automne prochain, au pire en 2011.

Clues

Juste avant, le sextet Clues a donné tout ce qu'il avait dans le ventre, même s'il était assez évident que les fans n'en avaient que pour Malajube. Il faut dire que du disque (excellent) à la scène (celle du Métropolis, en tout cas), il y a un pas que le groupe a eu du mal à franchir. Chaotique, mal sonorisé - la batterie paraissait épouvantablement étouffée sous les guitares, le violoncelle était inaudible -, Clues a tout de même fourni de beaux moments de grâce, empêtré dans la prétention «prog» de son rock-pop têtu, mais nourrissant.

Si on tenait à chercher des poux à cette soirée autrement endiablée, il faudrait alors montrer les fans du doigt. L'affiche de la soirée était pourtant béton; mais alors, où étaient les amateurs de bon rock? Au mieux, le Métropolis était plein aux trois quarts. C'est loin d'être mauvais, surtout que la qualité des fans ne faisait aucun doute, mais tout de même, pour une telle soirée, et après le battage médiatique qui l'a précédée, on aurait cru que les vacances du temps des Fêtes pouvaient bien attendre quelques heures de plus.