La vie tisse parfois de ces coïncidences si belles que l'on se croirait dans un roman... ou dans un opéra de Mozart! À peine la soprano Hélène Guilmette vient-elle de prononcer «oui, je le veux» dans la vraie vie que la voilà sur le point d'enfiler la robe de Susanna, fiancée de Figaro, dans Les noces de Figaro, présenté à l'Opéra de Montréal.

Jeune mariée, Hélène Guilmette s'apprête à chanter son premier grand rôle à la compagnie. On l'a certes déjà entendue dans La Clemenza di Tito (Servilia) et dans Thaïs (Crobyle). Mais cette Susanna, personnage pivot de l'intrigue, objet de la convoitise du Comte Almaviva, est un défi vocal beaucoup plus substantiel.

«C'est l'un des plus longs rôles du répertoire pour soprano, dit-elle. Susanna demeure sur scène presque du début à la fin, et on la voit plus souvent que Figaro lui-même. Elle est tellement présente que l'opéra aurait pratiquement pu s'appeler Les Noces de Susanna

La soprano a déjà interprété la soubrette à deux reprises auparavant, à Lille et au Théâtre des Champs-Élysées. C'était il y a trois ans. Depuis, sa voix s'est développée.

«J'ai chanté beaucoup de rôles qui ont fait ouvrir ma voix dans l'aigu, et qui ont donné plus de corps à mon registre médian, explique la chanteuse. Avec le temps, on change physiquement, et je sens vraiment une évolution avec la trentaine.»

Aujourd'hui soprano lyrique léger, la jeune chanteuse interprète surtout Mozart: Pamina, Susanna, Ilia, mais également Sophie dans Werther de Massenet, et Soeur Constance dans Dialogues des carmélites, de Poulenc. Elle mène par ailleurs une belle carrière de récital centrée sur le répertoire baroque.

«La voix évolue toute la vie. Dans quelques années, je serai soprano lyrique, mais je veux rester dans le lyrique léger le plus longtemps possible, car j'aime ces rôles, et j'espère jouer Constance encore plusieurs fois.»

Une année folle

L'année qui vient sera sans contredit sa plus occupée depuis qu'elle fait son chemin sur la scène internationale. Quelques semaines après Les noces, elle s'envolera pour Bruxelles où elle donnera des récitals, suivis de ses débuts, en novembre, avec l'Orchestre National de France et le Choeur de Radio-France, dans le Gloria de Poulenc diffusé à la radio. Elle interprètera ensuite Oriane dans Amadis de Gaule de Jean-Chrétien Bach, à l'Opéra Comique, à Paris.

Après Noël, ce sera un marathon de rôles importants dans trois productions successives. D'abord, Eurydice, dans Orphée et Eurydice de Gluck, à Angers et à Nantes, suivi du rôle d'Hébé dans Les Indes galantes de Rameau, à Toulouse. Elle boucle enfin la boucle en revenant dans les jupes de Susanna pour ses débuts à Montpellier en juin.

«Trois productions en cinq mois, c'est beaucoup, dit-elle. Avec Les Indes Galantes, je fais un premier essai dans un opéra baroque français. J'ai accepté parce que c'est dirigé par Christophe Rousset, un spécialiste de cette musique. Quant à Montpellier, c'est une étape importante, car elle va m'ouvrir d'autres portes. Je ne pouvais vraiment pas refuser.»

Un parcours atypique

Cette carrière internationale n'était pas un rêve d'adolescente pour la chanteuse originaire de Montmagny. Elle se destinait à l'enseignement de la musique au primaire ou au secondaire, suivant les traces de ses parents professeurs. Alors que plusieurs des étoiles lyriques montantes du Québec (Marianne Fiset, Michèle Losier, Julie Boulianne, Étienne Dupuis) sont passées par l'Atelier lyrique de l'Opéra de Montréal, elle a plutôt étudié en éducation musicale, à l'Université Laval.

«Je suis un peu une outsider parmi les jeunes chanteurs, dit-elle. Je n'ai pas fait l'Atelier, et j'habite encore ma région natale. Pendant mes études en musique, mon instrument principal était d'abord le piano, que j'étudiais depuis l'âge de 5 ans. J'ai commencé à me passionner pour le chant en interprétant du Céline Dion et en m'accompagnant au piano dans les restaurants pour gagner un peu d'argent! J'aimais tellement cela que j'ai décidé d'avoir deux instruments principaux à l'université, chant et piano en même temps. J'ai vraiment travaillé fort.»

À ses côtés, on entendra Phillip Addis (Comte Almaviva), Nicole Cabell (Comtesse Almaviva), Robert Gleadow (Figaro) et Julie Boulianne (Cherubino), dans une mise en scène traditionnelle de Tom Diamond. L'Orchestre Métropolitain sera dirigé par Paul Nadler. Important: les représentations sont avancées à 19h30 cette année.

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Les noces de Figaro, 17, 20, 22, 24 septembre, à 19h30, salle Wilfrid-Pelletier.