L'annonce de la mort du père Fernand Lindsay, mardi soir, a donné lieu à un concert d'éloges hier en provenance du monde musical et d'ailleurs. Les gouvernements à Ottawa et à Québec ont souligné l'importance de son apport à la vie culturelle, pendant que d'autres pleuraient l'ami.

La codirectrice artistique du Festival international de Lanaudière entre 1990 et 2000, Louise Forand-Samson, n'arrivait pas à se faire à l'idée, hier en fin d'après-midi, de la disparition du père Lindsay.

«J'ai les jambes coupées et le coeur en charpie», a-t-elle confié à La Presse de sa résidence de Québec. Elle lui avait parlé à quelques reprises encore dimanche au téléphone, alors qu'il était à l'hôpital.

Sa relation d'ami-collègue-complice-confident avec celui qu'elle appelait tout simplement «Fernand» représente une longue histoire de 50 ans.

«Je l'ai connu quand j'avais 15-16 ans dans les Jeunesse musicales. Il m'a fait jouer du piano et m'a embauchée comme enseignante. Il m'a toujours entraînée dans ses nombreux mauvais coups. On était, comme je lui disais, partners in crime. On aimait le bon vin, la bonne bouffe et on n'était pas minces ni l'un ni l'autre.»

La «nébuleuse» Lindsay

Idéateur, motivateur, et débusqueur de talents, Fernand Lindsay a aidé à créer en près de 60 ans de vie active une bonne partie de l'univers musical québécois. Il existe une nébuleuse Lindsay en quelque sorte.

«C'était ma Voie lactée, s'écrie celle qui est aussi directrice artistique du Club musical de Québec. Pourtant, nos tempéraments étaient aux antipodes. Il était calme et patient alors que je suis tout le contraire. On avait un immense respect l'un pour l'autre. Chez un ami, je ne retrouverai jamais une telle connivence. Il savait écouter mieux que quiconque.»

Mme Forand-Samson insiste sur le fait que plusieurs artistes, musiciens, organisateurs et autres membres de la grande communauté culturelle québécoise lui sont redevables.

«Je ne sais pas comment la vie musicale va faire pour continuer sans lui. Tout ce qu'on lui doit. Le nombre de jeunes qu'il a encouragés, le nombre de talents qu'il a découverts. Il y a une telle cohorte qui suit derrière lui. Fernand avait une force herculéenne tranquille.»

Elle croit que sa foi inébranlable, sa passion et sa grande force de conviction ont réussi littéralement à transporter lacs et montagnes au cours des ans.

«Quand on a fondé le camp musical, il nous fallait transporter plusieurs pianos de l'autre côté d'un lac où il n'y avait pas de pont. Il disait aux gens, on va aller prendre une bière. On s'asseyait devant une bouteille. Il laissait monter la soif. Puis après, c'était la jouissance de la bière. Quand on est sortis de là, c'est une analogie, mais le pont était pour ainsi dire construit!»

 

Biographie

> 1928: naissance le 11 mai, à Trois-Pistoles

> 1943: étudie le basson au Séminaire de Joliette

> 1948: devient clerc de Saint-Viateur

> 1953: entre dans l'enseignement

> 1954: études médiévales à l'Université de Montréal

> 1962: institue un festival-concours au Centre d'art d'Orford

> 1963: étudie à l'Institut catholique de Paris et à la Sorbonne

> 1967: établit le Camp musical de Lanaudière à Saint-Côme

> 1978: fonde le Festival d'été de Lanaudière

> 1986: nommé membre de l'Ordre du Canada en 1986

> 1990: reçu chevalier de l'Ordre national du Québec