Théodore Dubois (1837-1924) connaît présentement, chez nous, une véritable «renaissance». Ce soir, 19h30, au Conservatoire, se termine une série de trois concerts commentés, consacrés à sa musique, et réunissant notamment le Trio Hochelaga, le baryton Marc Boucher et le pianiste Olivier Godin, tous artisans de ce mouvement visant à démontrer que Dubois fut davantage que l'auteur des mélodramatiques Sept Paroles du Christ de nos églises paroissiales.

Avec le Choeur et l'Orchestre Philharmonique du Nouveau Monde dont il est le chef, Michel Brousseau s'est fait lui aussi le champion de Théodore Dubois. Il a tiré de l'oubli et monté ici la Messe solennelle de saint Remi en 2008 et la Messe de la Délivrance l'année suivante et vient de signer chez ATMA un disque qui les réunit toutes deux et fait 70 minutes.

 

Les deux messes font appel à un choeur et deux solistes (soprano et baryton), avec accompagnement d'orgue et, dans le deuxième cas, de cuivres et percussions. La messe pour saint Remi (et non «Rémi») date de 1891 et fut inspirée par la conversion de Clovis Ier, roi des Francs, que l'évêque de Reims (et futur saint Remi) baptisa en 496. La «délivrance» que chante l'autre messe se réfère au retrait de l'armée allemande du territoire français à la fin de la guerre de 1914-18. Cette seconde messe date de 1919.

La première messe est assez conventionnelle; on y sent d'ailleurs l'influence de Fauré. La deuxième est plus originale. Il est clair que la déroute des Allemands, événement d'ailleurs frais à sa mémoire, avait stimulé Dubois davantage que le baptême de Clovis. L'oeuvre débute par un appel de cuivres auquel s'enchaîne le choeur triomphal. Plus tard, des innovations rythmiques et harmoniques évoquent Berlioz.

Enregistrées à l'église Saint-Jean-Baptiste en septembre dernier, les deux oeuvres réunissent sensiblement les mêmes participants que lors des concerts. Michel Brousseau obtient de la masse chorale (plus de 100 voix, de quatre formations différentes) une prestation pleine de puissance et de ferveur où la nuance a aussi sa part. On oublie quelques passages d'une justesse un peu douteuse. À l'orgue, Jean-Willy Kunz crée quelques beaux effets de registration.

Les solistes sont la soprano polonaise Maria Knapik et Marc Boucher, déjà nommé. Dubois place les solos de soprano très haut dans la tessiture. Malgré un effort parfois évident, Mme Knapik est plus écoutable ici qu'elle ne l'était en concert. M. Boucher ne possède pas une grande voix mais il l'utilise en musicien raffiné.

Une erreur à corriger: le solo du Kyrie de la Messe de la Délivrance est pour soprano et non pour baryton. Par ailleurs, la notice biographique de Mme Knapik, en page 12, nous apprend qu'elle participa en 2009 à la «première mondiale» de cette messe dont la création remonte, selon les notes de la page 7, à 1919...

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THÉODORE DUBOIS: DEUX MESSES. DIR. MICHEL BROUSSEAU. ATMA, ACD2 2632.