Marc-André Hamelin est le soliste du volume 53 de l'ambitieuse série The Romantic Piano Concerto en cours chez Hyperion. Avec Ilan Volkov et l'Orchestre de la Radio de Berlin, il joue l'obscur et très long Concerto en fa mineur, op. 114, de Max Reger et le court et familier Burleske de Richard Strauss.

Disons les choses telles qu'elles sont: le Reger a la réputation d'être le plus assommant de tous les concertos pour piano du répertoire. Produit colossal et pompeux de la maturité du compositeur, il date de 1910. Son premier mouvement est aussi long que les deux autres réunis (durée totale ici: 37 minutes); le tout occupe le soliste presque sans répit et lui impose des acrobaties pianistiques, masses d'accords et déplacements qui requièrent la plus grande virtuosité et la plus grande endurance.

Cette virtuosité et cette endurance, Hamelin les possède depuis longtemps, et au plus haut point. À cet égard, sa stricte réalisation du texte extrêmement touffu est très impressionnante. En même temps, il s'efforce de tirer le maximum d'expression d'une partition qui hélas ! reste ce qu'elle est. Il se donne entièrementà la grande rêverie du piano seul ou presque seul au mouvement lent et, fidèle aux moindres indications de nuances, il parvient même à différencier «poco agitato» et «molto agitato».

Et pourtant, comme tous les autres avant lui, Rudolf Serkin en tête (une gravure historique de 1959), Hamelin n'arrive pas à convaincre. Au fond, le problème du Concerto de Reger est simple : il y manque ce fil conducteur mélodique qui accroche l'oreille. Il n'y a pas là trois notes qui forment un thème qu'on retiendrait. Tchaïkovsky et Rachmaninov ont compris cela, eux!

Loin de la prétention du Concerto de Reger, et dans les limites de sa durée (ici 19 minutes), Burleske est une page de jeunesse tour à tour brillante et chaleureuse dont on retrouve l'extrême séduction sous les doigts scintillants de Hamelin.

Dans les deux cas, chef et orchestre excellents, prise de son de même. Cette version de Burleske compte parmi les plus réussies que je connaisse. Bien sûr, il faut accepter aussi le Reger, dans lequel on pourra trouver de l'intérêt, ne seraitce que d'un point de vue historique ou documentaire.

 

MAX REGER,

RICHARD STRAUSS.

MARC-ANDRÉ HAMELIN, PIANISTE. HYPERION,

CDA67635