Depuis qu'elle a personnifié Cio-Cio-San dans Madama Butterfly en 2008, Hiromi Omura est adorée du public montréalais. De retour à la compagnie dans Il Trovatore, la Japonaise à la voix d'or chantera cette fois Leonora. La Presse l'a rencontrée après une répétition.

On découvre une femme douce, réservée, amicale et qui parle très bien le français. Langue qu'elle a apprise en discutant avec ses amis, car elle habite en France depuis 10 ans. Du côté de l'opéra français, elle a d'ailleurs chanté plusieurs fois Micaëla, dans Carmen, et interprété des airs de Gounod et de Berlioz en concert. Mais c'est surtout chez Verdi et Puccini qu'elle enchaîne les rôles: la Liù de Turandot, la Desdemona d'Othello, et surtout, le rôle qui lui a valu la gloire partout, Cio-Cio-San.

Le public montréalais sera le premier à la voir en Leonora dans une production. En effet, si elle a souvent chanté des extraits d'Il Trovatore en concert, c'est la première fois qu'elle interprète le rôle du début à la fin.

Elle se dit ravie de l'équipe qui l'entoure pour cette première. D'abord, le chef italien Francesco Maria Colombo, dont elle apprécie la direction. «C'est un chef hors du commun, dit-elle. Il est très exigeant, nous demande beaucoup d'expression et de précision, car il veut faire ressortir la beauté de la musique de Verdi. Il réussit à en faire vivre toute la magie.»

Le jeune metteur en scène Oriol Thomas, qui fait ses débuts à la compagnie, suscite également des bons mots de sa part. «Parfois, nous, chanteurs, avons envie de mettre beaucoup d'emphase, d'ajouter des gestes très théâtraux, mais avec lui, on recherche plutôt, dans le geste, la façon la plus naturelle possible d'exprimer les émotions. On essaie de rendre les personnages vraiment réalistes.»

Est-il vraiment possible d'être réaliste dans une histoire où s'entremêlent enlèvement d'enfant, meurtre, duels, suicide, gitans, bûcher et triangle amoureux? Prise entre Manrico, son amoureux secret, et le Comte de Luna, qui est fou d'elle, Leonora est déchirée.

Mais la chanteuse se fait une idée claire de son héroïne.

«Leonora est une femme forte, mais avec beaucoup de douceur, aussi romantique, amoureuse, rêveuse, dit-elle. Souvent, chez Verdi, les personnages féminins sont remplis de dignité et de noblesse de caractère. Ils possèdent une force intérieure et, si je peux m'exprimer ainsi, un certain côté masculin que n'ont pas nécessairement les personnages de Puccini. Peut-être est-ce grâce à la musique du compositeur, qui semble monter vers le ciel telle une prière.»

Tout cela repose sur une partition convenant bien à sa voix. «Je suis plutôt une soprano lyrique, mais avec une couleur capable de porter plus d'accent dramatique qu'une simple soprano lyrique. Je dois faire bien attention quand je choisis mes rôles.»

Une enfance musicale

Hiromi Omura a été élevée par des parents mélomanes, qui remettaient sans fin des disques de Maria Callas et de Renata Tebaldi. «J'ai grandi en écoutant cette musique occidentale comme si c'était l'air que je respirais. Je me souviens qu'à 17 ans, j'ai été très impressionnée par un enregistrement de Carmen de Maria Callas. J'étais fascinée par le fait que l'on pouvait comprendre la personnalité de Carmen à travers sa voix. On pouvait l'imaginer sans même la voir.»

Portée par cette inspiration, elle a entrepris des études de chant au Conservatoire national de Tokyo et perfectionné ensuite son art en Italie, puis en France.

À ses côtés dans cette production, on découvrira le Coréen Dongwon Shin en Manrico, qui fait ses débuts à la compagnie. Le baryton canadien Gregory Dahl interprète le Comte et la mezzo italienne Laura Brioli, la gitane Azucena.

Il Trovatore, de l'Opéra de Montréal, 21, 24, 26, 28 janvier, à 19h30, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts.