Se produire quelques jours au Théâtre du Rond-Point, sur les Champs-Élysées, c'est déjà une sorte de consécration. Le conteur Fred Pellerin va y tenir l'affiche, lui, pendant cinq semaines et 25 représentations, ce qui devrait marquer une étape cruciale dans sa carrière française.

Cinq semaines, c'est plus qu'il n'en faut pour que les médias et la rumeur s'en mêlent. Sur ce plan, les choses s'annoncent plutôt bien, le spectacle affichant complet pour la première semaine.

Il faut dire qu'il a eu un bon coup du pouce du rédacteur en chef du service arts et spectacles du magazine L'Express, Éric Libiot, qui a décrit L'Arracheuse de temps comme «le spectacle le plus drôle de l'année». Quand à l'influent directeur du théâtre, Jean-Michel Ribes, il y croit dur comme fer: «ça va se répandre comme une trainée de poudre», prédit-il.

Le conteur de Saint-Élie s'est donc installé mardi soir dans la petite salle de 200 places du Rond-Point, un des meilleurs et des plus prestigieux théâtres de Paris.

Fred Pellerin, habitué à des salles plus grandes, ne cachait pas qu'il était particulièrement nerveux. L'«aura du lieu» y était pour beaucoup, mais aussi ses contraintes. Pour s'y plier, Pellerin a du couper une bonne demi-heure à L'Arracheuse de temps. Comme tout le récit s'imbrique, il avait peur de perdre le fil. «Il manquait deux contes, c'était pas 'lousse' comme d'habitude. Il fallait que le casse-tête tienne quand même», a-t-il confié à l'issue de la représentation.

Le public n'a rien vu, qui a longuement applaudi le conteur. L'accent du conteur n'a posé aucun problème non plus, bien au contraire. «Au bout d'un moment, on ne se demande plus si c'est du Québécois ou des mots qu'il a imaginés. C'est tellement inventif», expliquait une spectatrice (française) qui a «beaucoup ri».

«Il est extrêmement drôle et émouvant en même temps, c'est rare, ajoute pour sa part Jean-Michel Ribes. Puis ce n'est pas un de ces artistes québécois formatés comme on en voit trop souvent. Il est Fred Pellerin avant d'être québécois. Il est folklorique et universel à la fois. Quand on parle de son village, on parle du monde.»

Ribes avait eu un «coup de coeur» pour Pellerin lorsqu'il l'a découvert l'année dernière au Petit Saint-Martin. L'affaire s'était conclue en quelques minutes après le spectacle, dans la loge du conteur.

«Il aurait voulu que Fred reste deux mois, mais ce n'était pas possible. Il n'avait pas le temps», racontait mardi soir la productrice du Québécois, Micheline Sarrazin.

Les grands médias doivent défiler au Rond-Point au cours des prochains jours. Il faudra surveiller les critiques, mais on peut penser que le ton sera globalement positif, voire plus si affinités...

Fred Pellerin est encore un inconnu en France, mais on a l'impression que ça ne va peut-être pas durer.