Quatre ans après un passage remarqué aux soirées de Contes urbains, Fabien Cloutier retourne à La Licorne avec Scotstown. Un monologue à la fois cru et comique qui confirme qu'il est un conteur naturel.

Rieur, facile d'approche, mais aussi franc et direct, Fabien Cloutier est «un bon Jack». Comme le narrateur de Scotstown qu'il décrit lui-même comme «un bon Jack tout croche qui ne s'exprime pas de la bonne façon». Ce n'est pas un détail. La manière de dire les choses, voilà le coeur de sa pièce, présentée à compter de mardi à La Licorne.

 

Dans Scotstown, le dramaturge et comédien campe un jeune homme qui n'a pas de nom et pas d'autre emploi du temps que de faire pousser du pot, en vendre et en fumer. Un gars apparemment sans histoire, mais qui en a plein à raconter. Comme ça lui vient et «dans ses mots».

«Il a une espèce d'honnêteté. C'est quelqu'un qui ne met pas de vernis sur ses propos. Il ne pense pas qu'il peut choquer», souligne Fabien Cloutier. Pourtant, il en dit des énormités! Des drôles, des moins drôles, tout en usant d'un vocabulaire qui peut effectivement heurter certaines sensibilités.

L'auteur, qui a été formé au Conservatoire d'art dramatique de Québec, n'ose pas dire que la langue est un personnage à part entière de sa pièce, mais il n'aurait pas tort. Ce ne sont pas les faits et les gestes qui choquent ou font rire, mais comment ils sont racontés et les préjugés que ce discours sous-tend.

«C'est une espèce d'ignorance qui, pour moi, n'est pas coupable, parce que sa perception des choses va changer au cours de la pièce, explique l'auteur. Le spectacle dans son entièreté, j'en suis sûr, montre l'humain qu'il y a derrière ces phrases choquantes-là.»

Scotstown suscite à la fois rire et inconfort, selon son auteur, qui l'a déjà présenté une vingtaine de fois, dont quelques représentations à La Petite Licorne l'an dernier. «Je sens autant les rires que, je ne dirais pas le malaise mais la respiration du public, dit-il. Je les entends respirer pour avaler certaines répliques, en particulier dans le premier conte.»

Dans ce segment, intitulé Oùsqu'y é Chabot?, le narrateur relate une virée à Montréal où il parle des «gros fefis habillés en cuir» et des «grosses» que son chum drague quand il se fait tard. Une saisissante entrée en matière, qui a déjà poussé des spectateurs à quitter la salle au bout de dix minutes. Fabien Cloutier estime que ceux-ci tombent dans le même piège que son personnage et ne voient que la surface des choses.

Sa langue, il l'assume et affirme qu'il ne changera pas une ligne pour plaire à qui que ce soit. «Je tiens plus à mon idée qu'à l'approbation de tous», dit-il. Tête de cochon? Sans doute. Chose certaine, ce jeune auteur a une bonne tête.

Scotstown, de Fabien Cloutier, du 27 octobre au 7 novembre à La Licorne.