Présenté quatre fois au prestigieux Théâtre national de Chaillot, salué par le quotidien Libération, J'aimerais pouvoir rire, la nouvelle création de la contorsionniste Angela Laurier, est un objet étrange et troublant.

Le spectacle évoque la psychose familiale et particulièrement la schizophrénie de son frère, Dominique, qui déploie sur scène sa grande silhouette.

Dans une sorte de confession vidéo projetée sur une vaste voile, Dominique parle à coeur ouvert de sa maladie, des soins qu'il a reçus en psychiatrie depuis un quart de siècle, des injections quotidiennes, de ses hallucinations peuplées de saints ou de divinités amérindiennes.

«Pour le spectateur, c'est une étrange sensation que de pénétrer aussi directement au sein d'une famille et dans la vie personnelle de Dominique», a noté Libération, qui a consacré à Angela Laurier la semaine dernière le portrait qu'il publie chaque jour en dernière page et qui a pratiquement valeur de consécration à Paris.

«Dominique n'est pas en représentation, a confié la contorsionniste. Etre sur scène lui donne une raison de vivre et il adore les tournées. Il a passé des années à être nourri, logé, à recevoir des injections, il était entièrement assisté. Il dit qu'il revit maintenant, à 50 ans. Voilà, c'est possible.»

Mêlant contorsion, danse, projections de photos souvenirs et de vidéo, J'aimerais pouvoir rire n'est pas seulement un spectacle, mais la prolongation de la vie des Laurier. Après Exutoire et Déversoir, c'est le troisième spectacle créé par Angela Laurier (et le premier mis en scène par Lucie, la comédienne, qui est la petite soeur d'Angela) autour de la psychose qui a vu sombrer son frère et sa soeur Brigitte pendant que son père connaissait des épisodes dépressifs soignés par électrochocs.

«La folie... Nous avons tous dans la famille une fragilité qui nous tend vers elle, pourquoi certains ont basculé?», se demande Angela Laurier sur le site du festival Anticodes.

Cette fragilité psychologique familiale, la contorsionniste l'assume entièrement sur scène, pour mieux la combattre ou lui donner un sens. Dépourvu de toute sensiblerie, le résultat est souvent bouleversant.

«C'est de l'énergie qu'elle transmet. Une certaine joie de bouger, de se plier sans rompre, de se faufiler là où les portes semblent se refermer», a conclu Libération.

«J'aimerais pouvoir rire» a été présenté dans la petite salle de Chaillot dans le cadre du festival Anticodes, auquel sont associés deux théâtres de Brest et de Lyon. Angela Laurier y présentera son spectacle le mois prochain.