Kick, le titre de la nouvelle pièce d'Étienne Lepage, fait référence à ces petits coups de pied, coups de poing, coups derrière la tête et autres «bines» que s'applique à nous envoyer l'auteur de Rouge gueule.

Écrite dans la foulée de Rouge gueule, Kick se nourrit de la même envie de l'auteur de montrer des personnages qui nous font sourciller, qui dérangent. D'explorer leur côté méchant et cruel. Sans jamais les juger. De les amener à la limite de ce qui est acceptable de dire, de faire ou de penser.

«La force (de la pièce) ne tient pas tant au caractère cru du texte, mais à tout ce qu'il laisse en suspens», écrivait mon collègue Alexandre Vigneault à propos de Rouge gueule. Étienne Lepage revisite ces mêmes zones sombres et ambiguës dans Kick. Avec une note plus «pop» et une énergie plus jeune.

«Il y a dans les personnages de Kick une urgence de nommer et de comprendre, dit l'auteur. Contrairement à Rouge gueule, qui jouait sur la solitude et la perversion des personnages, Kick s'attarde aux questions existentielles qui habitent les jeunes. C'est aussi plus ludique.»

Le metteur en scène Michel-Maxime Legault (Liaison pornographique, Top Dogs), du Théâtre de la marée haute, avait envie de travailler avec Lepage. C'est lui qui a hérité de ces portraits cyniques de l'auteur, qui ne suivent toujours pas de trame narrative, mais où, cette fois, les monologues sont entrecoupés.

«Il y a beaucoup plus de dialogues dans Kick. Et d'interactions avec les autres, précise Lepage. Par exemple, il y a un personnage qui est follement amoureux d'une fille qui, elle, se moque de lui. Le personnage s'adresse d'abord au public pour raconter son histoire, mais la fille fait son apparition dans la scène et replonge le personnage dans son histoire.»

La pièce n'a pas été écrite spécifiquement pour un public adolescent, mais Étienne Lepage avait envie d'explorer la place que les jeunes prennent dans la société. «C'est bien sûr une préoccupation importante chez les jeunes, mais je crois que ça ne nous quitte jamais complètement. On est toujours en train de se questionner là-dessus.»

Pourquoi revenir sans cesse sur cette cruauté des gens? «Parce que je la sens autour de moi. Et parce que je la trouve belle aussi, répond l'auteur de 30 ans, diplômé en écriture dramatique de l'École nationale de théâtre en 2007. C'est pour moi une forme de sagesse. Je veux dire d'accepter le côté tragique de la vie; d'accepter que notre destin est de mourir. Et parfois même de souffrir.»

Étienne Lepage et Michel-Maxime Legault ont puisé dans l'univers de la danse contemporaine pour Kick. Avec la chorégraphe Caroline Laurin-Beaucage, ils ont un peu exploité le côté maladroit des six comédiens, qui ne sont évidemment pas des danseurs.

«Comme Rouge gueule et Kick sont de la même famille, je trouve ça intéressant de voir comment les metteurs en scène interprètent mes textes, qui sont un peu des chèques en blanc, qui font volontairement la moitié du chemin», dit Étienne Lepage.

Il ne nous reste qu'à recevoir le coup de pied...

Kick, du Théâtre de la marée haute, au théâtre Aux Écuries du 9 au 27 mars.