L'image des compagnies canadiennes de théâtre, de cirque ou de danse perd peu à peu de son lustre sur la scène internationale depuis l'abolition, par les conservateurs, de programmes d'aide gouvernementaux visant à soutenir les artistes en tournée aux quatre coins du monde.

Voilà ce qui ressort d'une étude menée par la Conférence internationale des arts de la scène (CINARS) auprès de 291 compagnies artistiques, afin de connaître les impacts de l'abolition en 2008 de deux programmes d'appui à la tournée internationale, PromArt et Routes commerciales.

Plusieurs diffuseurs et promoteurs étrangers hésiteraient maintenant à acheter des spectacles produits par les artistes d'ici puisque, en raison du manque de soutien de la part du gouvernement fédéral, ils sont plus coûteux que ceux présentés par leurs compétiteurs français, australiens ou japonais, a déploré hier le président-directeur général de CINARS, Alain Paré, au cours d'un point de presse à l'issue de la conférence visant à dévoiler les résultats du rapport.

Deux ans après que le gouvernement Harper eut décidé de mettre la hache dans les deux programmes, dont le budget était de 5,4 millions pour donner un coup de pouce aux artistes à l'étranger, près de 175 tournées internationales ont été annulées pour un total d'environ 1600 représentations. Total des pertes de revenus: 15,8 millions. Et sur la scène internationale, où les troupes canadiennes et québécoises sont beaucoup moins présentes, la réputation des artistes d'ici commence à en prendre pour son rhume.

«Ça coûte cher pour présenter des artistes canadiens.» Voilà une remarque qu'entend régulièrement Alain Paré.

«Actuellement, il y a un retrait des programmateurs, des diffuseurs étrangers par rapport à l'achat (de spectacles) des compagnies canadiennes, affirme le président de CINARS. Tous les autres pays appuient leurs compagnies dans leurs tournées à l'international. La place est laissée à la compétition. Et c'est là qu'on va payer très cher à moyen et long terme.» Certaines troupes risquent ainsi de devoir cesser leurs activités.

C'est que, lorsque les diffuseurs souhaitent faire venir dans leur pays des compagnies d'ici, ils doivent assumer certains frais qu'ils n'ont pas besoin de couvrir en faisant appel à des troupes françaises ou chinoises. Par exemple, quand Les 7 doigts de la main se produisent à l'étranger, ils demandent maintenant au diffuseur de payer les coûts de transport. Ce qui n'était pas le cas avant.

Consternation

Plusieurs promoteurs étrangers peinent à comprendre la décision du gouvernement fédéral, a souligné hier Alain Dancyger, directeur général des Grands Ballets canadiens. Lors d'un passage en Égypte, un diffuseur lui a même lancé qu'il pouvait difficilement espérer qu'une compagnie égyptienne le soutienne si son propre gouvernement ne lui venait pas en aide. «Êtes-vous assez bons?» s'est-il fait demandé. La compagnie est d'ailleurs à la recherche de 330 000$ pour boucler le budget d'une tournée qu'elle fera en Chine. «Si je dis non à la Chine, on n'y retourne plus, c'est foutu.»

Par ailleurs, à la suite du dévoilement des résultats de son étude, CINARS demande au gouvernement le rétablissement d'une enveloppe de 7 millions. La Parti libéral du Canada appuie cette initiative et a promis de rétablir les programmes s'il est élu. Pour sa part, le ministre du Patrimoine, James Moore, a été interrogé à ce sujet hier à la Chambre des communes.

«Dans chacun de ses quatre budgets, le gouvernement conservateur a augmenté son financement et son appui pour les arts, la culture et le patrimoine au Canada. Cela inclut les festivals, les bibliothèques, les musées, les théâtres et les artistes directement», a-t-il déclaré.