Avant même le début du Mur du son, on était déjà impressionné par l'audace de la mise en scène. Cette audace, c'était un échafaudage géant de 60 pieds, avec 250 choristes répartis sur cinq étages et voilés en partie par un écran translucide qui sert de toile aux projections.

Cet ensemble résulte de la rencontre entre Scala, une chorale belge, et des chanteurs et musiciens québécois. Il interprète un pot-pourri de tubes des années 80 et 90. Chaque tube a été réarrangé pour le spectacle. Le plus souvent, la section rythmique s'efface pour laisser la place aux cordes et au piano. Chaque pièce est accompagnée par une différente vidéo et par d'occasionnels effets pyrotechniques.

Musicalement, cela ne surprend pas toujours. On propose des pièces pour tous les goûts. Ce pari rassembleur rend le résultat un peu inégal. On est forcément touché par certaines pièces et lassé par d'autres.

À l'ouverture, on est tout de suite frappé par la silhouette des choristes qui semblent emprisonnés derrière la toile. On croirait presque entendre des lamentations de prisonniers. Certaines vidéos restent parfois un peu convenues - entre autres des gros plans d'âmes esseulées au bord de la plage. Il faudra attendre Everything In Its Right Place de Radiohead pour découvrir toute la puissance du concept. Des lumières scintillantes illuminent la toile noire, pendant que la fenêtre donnant sur les sopranos est saturée de rouge. Des feux d'artifice enterreront le refrain - un peu comme au dernier concert de Radiohead au parc Jean-Drapeau. Sauf que cette fois, c'est volontaire.

La foule accueillait le tout sagement. Peut-être était-elle contemplative. Le crachin de pluie seyait à la douceur musicale.

Les succès de Coldplay, de Depeche Mode, de The Cure et de plusieurs autres groupes défileront ensuite. À l'écran, on voit des vidéos, des carrés de couleur, des images du chef d'orchestre placé devant la foule et parfois même des textes. Les effets pyrotechniques varient aussi. Ils virevoltent et changent de vitesse dans le ciel durant la pièce de The Cure. Et ils explosent très fort - peut-être plus que prévu - durant Smells Like Teen Spirit de Nirvana.

Toujours visuellement très beau. La relecture musicale, elle, surprend un peu moins. Les arrangements deviennent un peu plus variés avec The Police. La section de cordes et les voix plus graves nuancent alors agréablement la proposition.

Comme c'était la fête nationale de la Belgique hier soir, le chef d'orchestre, M. Kolacny, s'est permis un hommage avec trois pièces de Pierre Rapsat. Venait ensuite une autre belle trouvaille, Beautiful People de Marilyn Manson. Le piano résonnait gravement pendant qu'on montrait des portraits de jeunes, comme des échantillons de la beauté de la race humaine. Ces visages devaient toutefois partager l'écran avec l'image du chef d'orchestre en pleine action. On aurait aimé que les jeunes prennent toute la place.

Mais il s'agit de détails. Dans l'ensemble, Mur du son étonne par sa spectaculaire beauté et son originalité. Après avoir réussi l'exploit de poétiser la musique de Kylie Minogue, la troupe a invité sur scène Stéphane Rousseau. Dans ce clin d'oeil au volet plus humoristique du festival, Rousseau a chanté Tainted Love et Creep. Une idée sympathique qui permettait de casser le rythme après plus de 60 minutes de chorale.

Claude Dubois clôturait la soirée. Il entonnait Femme de rêve lorsque l'heure de tombée nous a contraints de quitter. En regardant de près l'immense structure et la foule qui s'étirait sur la Place des festivals, on se disait que Montréal est après tout une ville spéciale. Et qu'il serait fou de rater la dernière représentation de ce spectacle gratuit.

___________________________________________________________________

Mur du son, pour une dernière fois ce soir à 21 h 30 à la Place des festivals.