Pol Pelletier n'avait pas présenté de spectacle au Québec depuis cinq ans. Compte tenu de la singularité du personnage et du parcours de l'artiste, c'est un retour qui n'a rien de banal. Or, si la comédienne demeure une performeuse de haut vol, il n'est pas certain qu'elle atteigne l'objectif avoué de son nouveau spectacle, soit faire résonner des textes peu entendus.

Le corps d'Une contrée sauvage appelée courage, ce sont des chansons et deux «textes-rivières» comme elle les appelle: Élégie au génocide des nasopodes de Michel Garneau et Les vaches de la nuit de Jovette Marchessault. Pol Pelletier les fait porter par son nouveau personnage, Ramie, qui est l'acronyme de «Royale artiste mendiante itinérante extatique». Une espèce de diseuse publique derrière laquelle la comédienne peine à s'effacer.

Comme dans Joie il y a 15 ans, son charisme happe. Elle bouge avec grâce et contrôle parfaitement chaque facette de son jeu physique. Un instant elle arbore une mine franchement inquiétante et, l'instant d'après, elle ressort cet inimitable sourire, lumière vive dans la noirceur.

Sa gestuelle accompagne son propos, mais l'illustre aussi beaucoup trop. Tout particulièrement au moment de livrer le poème très dense de Michel Garneau. Pol Pelletier dit vouloir faire entendre une parole, mais fini souvent par nous en distraire. Ou alors elle se place carrément devant.

Est-il si nécessaire de raconter les circonstances de la création du spectacle, en France, il y quelques années? Doit-elle se plaindre ouvertement du fait que les textes de Jovette Marchessault ne sont plus jamais montés où laisser le spectateur décider de le regretter tout seul? Se mettre de l'avant de la sorte constituait un choix logique lorsqu'elle racontait son parcours - et de ce fait tout un pan de l'histoire du théâtre au Québec -, mais pourquoi est-ce si nécessaire ici?

L'artiste n'est peut-être pas l'unique responsable de ce rendez-vous manqué. La salle n'a pas aidé sa cause. eXcentris deviendra peut-être une destination pour la musique, mais pour le théâtre, ce n'est pas souhaitable. La visibilité est très moyenne et l'acoustique laisse franchement à désirer.

Pol Pelletier n'est pas la comédienne la moins en voix de l'univers. Pourtant, assis au milieu de la salle, sa parole avait déjà perdu beaucoup de corps et de force. Quand elle chantait, sans amplification et parfois accompagnée de l'accordéoniste Mélanie Bergeron, c'était pire. En plus, c'est un environnement trop guindé pour cette clocharde céleste. Mauvais casting, comme disent les gens de cinéma.

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UNE CONTRÉE SAUVAGE APPELÉE COURAGE de Pol Pelletier, les 4 et 18 novembre à eXcentris.