Le défi de L'amour à trois est de trouver le troisième partenaire...

Hormis le fait qu'on nous présente trois courtes pièces de Larry Tremblay mises en scène par trois femmes (Francine Alepin, Caroline Binet et Marie-Ève Gagnon), l'amour qui y est décrit est bien plus solitaire que multiple. Plus égoïste en tout cas.

Dans les trois pièces, le sentiment amoureux est totalement destructeur, que ce soit dû à l'ennui, à l'intensité ou au doute. Larry Tremblay (The Dragonfly of Chicoutimi, Le ventriloque) est impitoyable dans le regard qu'il pose sur les relations de couple.

N'empêche. Les esprits tordus seront comblés par l'étrangeté des rapports amoureux, parfois loufoques, mais aussi troubles. Surtout, L'amour à trois se distingue par le langage corporel des comédiens; par leur jeu très physique et en même temps créatif qui rythme bien le texte.

La première pièce, La femme aux peupliers, mise en scène par Francine Alepin (qui joue dans la troisième pièce), nous donne à croire que ce triptyque prendra des airs de comédie absurde.

Une femme (exquise Markita Boies), lasse d'entendre ses amants lui dire «je t'aime», mais surtout frustrée de constater leur incapacité à la séduire de façon un peu originale ou poétique, les transforme en arbres - un voeu que doivent partager, avec raison, bon nombre de femmes...

La deuxième pièce, Cornemuse, sonne la fin de la récré. La pièce la plus longue, tragique et gore des trois met en scène un couple «moderne» (très bons Hubert Proulx et Christine Beaulieu) qui vit un violent coup de foudre. Violent comme dans bestial et extrême, où les amoureux n'hésitent pas à se mutiler.

Dans ce deuxième texte, un troisième personnage (tiens, tiens), invisible celui-là, appelle sans cesse au téléphone. On comprend qu'il est en détresse mais que son amie a, pour ainsi dire, d'autres chats à fouetter... On se demande où exactement veut nous mener l'auteur dans cette histoire. Tout est tellement gratuit et invraisemblable qu'il est difficile de ressentir ce que l'on voit.

La troisième pièce, Tibullus, pastiche de tragédie romaine qui réunit sur scène les quatre comédiens - François Papineau, Francine Alepin, Christine Beaulieu et Markita Boies -, apporte une touche de légèreté après la décharge électrique de Cornemuse.

Il faut voir François Papineau, craquant dans son personnage d'Oenothée, homme qui a changé de sexe pour connaître la jouissance de la femme, lire l'oracle à Tryphéma (Francine Alepin), qui veut savoir si son amoureux (aveugle) la trompe.

Sans doute le texte le plus fin des trois. Le plus ludique aussi. Pendant près de deux heures (avec un entracte de 15 minutes), on se désole tout de même de la tristesse de ces relations amoureuses qui implosent.

Dans la salle d'Espace libre, mercredi dernier, de jeunes tourtereaux tous deux vêtus de rouge ne se lâchaient plus ni des mains ni des yeux. Au point où l'on finit par se demander, imbibé des textes de Larry Tremblay: comment ça va finir, cette histoire?

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L'amour à trois d'Omnibus, jusqu'au 22 mai à Espace libre.