Un mot résume la pièce de Greg MacArthur: panique.

Le sentiment gagne chacun des membres d'une famille, qui étouffe sous la pression découlant d'une attaque survenue dans un autobus, à l'intérieur duquel se trouvait la mère. Un récit dramatique, presque politique, avec des pointes d'humour, qui ne fait que s'assombrir à mesure que progresse l'histoire mise en scène par Geoffrey Gaquère (Enquête sur le pire, Hôtel Pacifique).

La première partie de la pièce, inspirée d'un fait divers véridique, cherche à reconstituer les faits à la manière d'une enquête policière. Qu'est-ce qui s'est passé exactement? Qui est l'homme à l'origine de cette agression? S'agit-il d'un acte terroriste? Quelle est la substance chimique qui a été répandue? Bizarrement, il n'y a pas de conséquence directe à cet «incident», puisque tout le monde s'en sort indemne. C'est avec le temps que ça se gâte. Pour certains. Tout le génie de l'auteur se trouve là. Dans cette zone grise où l'on ne sait pas trop ce qui est vrai, et ce qui relève finalement de l'imagination.

Élise Guilbault joue parfaitement le rôle de cette femme traumatisée, qui glisse petit à petit dans un état de paranoïa avancé - contrairement à une autre passagère (très bonne Monique Spaziani), qui s'en sort plutôt bien, et qui nous force constamment à nous questionner sur ce qui s'est produit. Comment réussit-elle en effet à continuer son petit bonhomme de chemin comme si de rien n'était?

On ne peut malheureusement pas en dire autant de l'enquêteur en complet brun, trop insistante, trop stressante et trop statique, interprétée par Sophie Vajda, qui s'en sort mieux dans son rôle de médecin traitant. La comédienne ne trouve tout simplement pas le bon ton pour rendre crédible son personnage d'agent, à la limite agaçant.

Le premier à être contaminé par cette panique, est le mari et père de famille, que défend Guy Nadon avec beaucoup de caractère. Son interprétation vaut, à elle seule, le déplacement. C'est par lui que tous les drames se jouent. Celui de sa femme, le sien, mais aussi celui de sa famille qui se désagrège. En particulier ses deux grands enfants, qui rentrent au bercail pour l'aider à s'occuper de leur mère, mais qui se révèlent totalement inaptes à la tâche (comme lui d'ailleurs).

Mise en scène surchargée

Benoît Drouin-Germain, impeccable dans le rôle du garçon un peu paumé, rend bien compte de son impuissance à calmer ses parents. Sa soeur, interprétée par Sylvie De Morais, revient d'Algérie où elle travaille comme coopérante. Elle non plus ne parvient pas à renverser la vapeur, malgré son «exposition» aux vrais drames. La comédienne change constamment de ton, passant de trop guillerette à trop révoltée. Son personnage, en fin de compte assez superficiel, est d'une curieuse désinvolture lorsqu'elle parle des enfants amputés dont elle s'occupe.

À travers ce marathon psychologique, Geoffrey Gaquère propose une mise en scène peut-être un peu chargée - est-ce dû aux nombreux lieux représentés? -, qui s'avère par moments assez laborieuse. En même temps, il parvient à créer une tension constante pendant près de deux heures, qui traduit très bien le sentiment d'oppression dont sont victimes les personnages.

À la fin de tout ça, pas de happy end. Plutôt une bouffée de fraîcheur ressentie par les membres de cette famille qui s'éloignent les uns des autres. Surtout de cette mère angoissée, qui elle, devient totalement irrécupérable.

Au Théâtre d'Aujourd'hui jusqu'au 26 mars